samedi 13 mars 2021

La remarquable complaisance d’Aurore Bruna pour l’antisémitisme visant Kemal Atatürk

 


 

Aurore Bruna, L’Accord d’Angora de 1921. Théâtre des relations franco-kémalistes et du destin de la Cilicie, Paris, Le Cerf, 2018, p. 35 :

« Mustafa Kemal [Atatürk] naît à Salonique en 1881, dans une famille de condition moyenne, que certains disent d’origine albanaise ou juive (1).

_____________

(1) Michel Paillarès, Le Kémalisme devant les Alliés : l’entrée en scène du kémalisme, le traité de Sèvres, l’accord d’Angora, vers la paix de l’Orient, (1re éd. : 1922), réédité en 2005, p. 48. »

 

Commentaire : confondre quelqu’un avec un Juif (Atatürk était de famille turque et sunnite) n’est pas antisémite en soi ; c’est diaboliser un adversaire et en faire un Juif qui l’est, a fortiori si s’y ajoute une théorie du « complot judéo-maçonnique », ce qui est précisément le cas de la source indiquée, ainsi que d’un autre livre, très utilisé par Mme Bruna dans le sien : La Passion de la Cilicie de Paul de Rémusat, alias Paul du Véou, un agent d’influence de l’Italie fasciste. À un degré moindre, cette théorie du complot se trouve (dans sa variante visant le Comité Union et progrès) chez une troisième référence appréciée par Mme Bruna : René Puaux. Cette complaisance pour Paillarès est d’autant plus inexcusable que Mme Bruna cite aussi (ce qui est, en revanche, parfaitement justifié), l’ouvrage collectif dirigé par Gérard Groc et İbrahim Çağlar, La Presse française de Turquie, de 1795 à nos jours : la contribution de François Georgeon explique, documents à l’appui, que Paillarès s’était vendu à la Grèce. Par ailleurs, à longueur de pages, Mme Bruna répète des calomnies contre le mouvement national turc en général, et contre Kemal Atatürk en particulier (j’y reviendrai).

Or, Mme Bruna n’est pas n’importe qui : figure du parti Ramkavar, elle a été élue, en février 2018, président du Conseil de coordination des associations arméniennes de France pour le sud du pays (CCAF Marseille).

 

Sur la théorie du « complot judéo-maçonnico-dönme derrière le Comité Union et progrès et le kémalisme » :

Paul de Rémusat (alias Paul du Véou) : un tenant du « complot judéo-maçonnique », un agent d’influence de l’Italie fasciste et une référence pour le nationalisme arménien contemporain

La grécophilie, l’arménophilie et l’antijudéomaçonnisme fort peu désintéressés de Michel Paillarès

Le vrai visage de « l’alternative libérale » au Comité Union et progrès et au kémalisme

L’helléniste Bertrand Bareilles : arménophilie, turcophobie et antisémitisme (ensemble connu)

Le complotisme raciste des arménophiles-hellénophiles Edmond Lardy et René Puaux

 

Sur sa prégnance dans l’historiographie paléo-nationaliste arménienne, notamment ramkavar :

Le soutien d’Arthur Beylerian à la thèse du « complot judéo-maçonnico-dönme » derrière le Comité Union et progrès

Le soutien de Vahakn Dadrian à la thèse du « complot judéo-maçonnico-dönme » derrière le Comité Union et progrès

 

Et dans le discours militant :

L’« antisionisme » constant de Jean-Marc « Ara » Toranian

Jean-Marc « Ara » Toranian semble « incapable » de censurer la frénésie antijuive de son lectorat

La place tenue par l’accusation de « génocide arménien » dans le discours soralien

 

Sur le Ramkavar lui-même :

De l’anarchisme au fascisme, les alliances très variables d’Archag Tchobanian

L’arménophilie vichyste d’André Faillet — en osmose avec l’arménophilie mussolinienne et collaborationniste

L’Union générale arménienne de bienfaisance et le scandale des piastres

 

Sur le mouvement national turc et les Arméniens :

Non, il n’y a pas eu de « massacre d’Arméniens » à Kars en 1920 (ce fut le contraire)

Février-mars 1920 : une campagne francophobe et turcophobe des organisations nationalistes arméniennes

Cinq témoignages américains contredisant la prétendue « extermination des chrétiens du Pont-Euxin » en 1921

Kemal Atatürk et les Arméniens

Le rôle des Arméniens loyalistes en Turquie pendant la guerre de libération nationale et la conférence de Lausanne

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