samedi 9 octobre 2021

L’arménophile Francis de Pressensé sur l’impossibilité démographique du séparatisme arménien en Anatolie (1895)

 


 

Francis de Pressensé, « La question arménienne », Revue des deux mondes, 1er décembre 1895, pp. 676-677 :

« Les auteurs les plus dignes de foi évaluent à 600 000 ou 700 000 le nombre des Arméniens sujets russes, à 300 000 ou 400 000 le total des Arméniens sujets du schah de Perse, enfin à 1 200 000 ou 1 300 000 le total des Arméniens sujets du sultan. Il est toutefois une circonstance qui enlève beaucoup de leur valeur à ces chiffres bruts. Nulle part, pas même au cœur de leur ancien domaine patrimonial, pas même dans les vilayets de Bitlis, de Van et d’Erzeroum, les Arméniens ne forment la majorité de la population. Là où ils sont les plus nombreux absolument, dans le vilayet de Siwas [Sivas], où ils ne sont pas moins de 170 000, ils se trouvent en présence de 840 000 musulmans, et ils ne forment que 15 pour 100 de la population totale. En somme, il n’est pas une province, pas un district, presque pas un seul canton où la population arménienne soit en majorité et puisse équitablement revendiquer la suprématie pour sa nationalité.

La question arménienne ne serait qu’un jeu d’enfant, sans la coexistence de deux races et de deux religions hostiles sur le même sol. Rustem-Pacha, l’ambassadeur chrétien qui vient de mourir à Londres, disait avec cette pointe de paradoxe qui ne gâte jamais rien : “Il n’y a pas d’Arménie ; il y a cinq ou six vilayets de la Turquie peuplés, mais non en majorité, d’Arméniens.” Voilà un fait que l’on dirait systématiquement passé sous silence dans la plupart des appels adressés à l’Europe en faveur de cette nationalité malheureuse. Et Dieu sait si ce genre de littérature a chômé depuis quelques années ! »

 

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