lundi 26 juillet 2021

Ce que Lord Curzon pensait de la Fédération révolutionnaire arménienne

 



W. N. Medlicott et Douglas Dakin (éd.), Documents on British Foreign Policy. 1919-1939, First Series, volume XXV, Londres, Her Majesty’s Stationery Office, 1984, pp. 196-199 :

« Notes de M. Obsborne après une conversation avec M. Tchenkeli et M. Khatissian

Foreign Office, 17 juillet 1923

J’ai eu récemment la visite de M. Tchenkeli, représentant géorgien à Paris, et de M. Khatissian, le chef de la délégation arménienne, à Paris. […]

M. Khatissian qui, je pense, était au courant de la teneur du récent mémorandum remis par le secrétaire d’État [c’est-à-dire le ministre des Affaires étrangères au Royaume-Uni, Lord Curzon à l’époque] m’a assuré, non sans peine, que l’idée d’une coopération avec la Turquie n’était pas envisagée sérieusement, et que tous ses efforts, dans l’immédiats, étaient consacrés à fournir de la nourriture et des vêtements à ses compatriotes exilés. Au même moment, il fit valoir qu’ils ne pouvaient pas s’installer de façon permanente en Syrie, en Irak, en Grèce, en Bulgarie, etc., et que la question de leur trouver un foyer national [un territoire vaguement autonome, exactement le projet qui a échoué à Lausanne, en décembre 1922 et janvier 1923, après avoir été vidé de sa substance à la conférence de Paris, en mars 1922] gardait un caractère d’urgence et d’importance suffisant pour rendre essentiel d’examiner toutes les solutions possibles.

Il m’informa, avec une complaisance excusable, qu’il avait passé le week-end dans la famille du Premier ministre et que la dévotion du fils de ce dernier pour leur cause était très encourageante pour eux. Je lui que si cela pouvait être personnellement gratifiant, il ne devait supposer à aucun moment que cela pourrait avoir la moindre importance politique.

M. Khatissian et M. Tchenkeli m’ont demandé si la reconnaissance de jure de la Russie [par le Royaume-Uni ; il s’agit évidemment de la Russie soviétique] était vraisemblable, dans un futur proche, et si, le cas échéant, la possibilité de conditionner cette reconnaissance à l’évacuation, par les Russes, de leurs républiques [Arménie et Géorgie] pouvait être envisagée. Je leur ai dit que les affaires russes ne relevaient pas de ma compétence et que je ne pouvais exprimer aucune opinion.

D. G. Osborne

Lord Curzon a commenté par écrit, le 18 juillet : “Ces gens sont incurables. M. Obsborne leur a tenu des paroles sensées. Mais la maladie est mortelle.” »

 

Lire aussi :

L’exaspération de Lord Curzon face à la politique de purification ethnique mise en œuvre par l’Arménie (1920)

L’absence de tout projet précis de la part des nationalistes arméniens et de leurs partisans occidentaux lors de la conférence de Lausanne

Le traité de paix du 24 juillet 1923 : la victoire turque consacrée à Lausanne

Le soutien de certains Arméno-Américains au traité signé à Lausanne entre les États-Unis et la Turquie (1923)

La précocité du rapprochement entre la Fédération révolutionnaire arménienne et l’Italie fasciste (1922-1928)

L’effondrement de la République d’Arménie à l’automne 1920 et ses causes

Non, il n’y a pas eu de « massacre d’Arméniens » à Kars en 1920 (ce fut le contraire)

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