Aziz Zemouri, « Une
plainte en France contre les “combattants français” du Haut-Karabakh »,
Lepoint.fr, 29 décembre 2020 :
« Gilbert Minassian, un Français de 64 ans, condamné à une peine de
prison à perpétuité en 1989 après un braquage datant de 1984 destiné à financer
les actions terroristes de l'Armée secrète arménienne pour la libération de
l'Arménie (Asala), est lui aussi dans la ligne de mire de l'Azerbaïdjan.
L'Asala, de sinistre mémoire, avait commis un attentat à l'aéroport d'Orly en
1983 qui a tué huit personnes et blessé une cinquantaine d'autres. Minassian a
rejoint l'Arménie le 9 octobre en vue de se battre aux côtés des Arméniens du
Karabakh, comme il l'a annoncé au journal Libération
avant de quitter Paris. »
Markar Melkonian, My Brother’s
Road. An American Fateful Journey to Armenia, Londres-New York, I. B.
Tauris, 2007, pp. 166-167 :
« Le 10 janvier 1989, Monte [Melkonian,
condamné en France à six ans de prison pour association de malfaiteurs, en
relation avec une entreprise terroriste, détention illégale d’arme à feu et d’explosifs,
etc.] fut informé qu’il serait expulsé depuis Paris vers New York dans les
trois jours. […]
Un contact en France m’avait déjà informé, via une ligne téléphonique que
nous espérions être à l’abri des écoutes, que Monte risquait d’être extradé
vers les États-Unis [et d’y être à
nouveau condamné, mais cette fois pour des infractions plus graves]. […]
Heureusement pour mon frère, je n’étais pas le seul dans ce cas [c’est-à-dire à tenter quelque chose pour
empêcher cette extradition] : son camarade Shishko [Gilbert Minassian], perdu de vue depuis
longtemps, était déjà entré en action depuis des mois. Un an et demi plus tôt,
le Marseillais s’était évadé et avait fui en Grèce puis en Yougoslavie avec des
pièces d’identité falsifiées. (Au fil des ans, Shishko s’est retrouvé à
posséder pas moins de quarante-sept passeports, pour la plupart des faux.)
Pendant ce temps, un cour [la cour d’assises]
d’Aix-en-Provence l’avait condamné par contumace à la réclusion criminelle à
perpétuité. Maintenant que les avocats de Monte [principalement Henri
Leclerc] combattaient son extradition vers les États-Unis par des
moyens légaux, Shishko s’était embarqué dans une méthode plus directe. Depuis
son arrestation en 1984, il avait tenté de convaincre les fonctionnaires
français que lui, Monte et ses camarades s’étaient opposés à [Hagop] Hagopian [numéro 1 de l’ASALA jusqu’à sa mort en 1988, Monte Melkonian étant le
numéro 2 jusqu’à la scission de 1983] parce qu’ils étaient contre les
attentats tuant des non-combattants [affirmation
doublement absurde : les diplomates turcs n’étaient pas des « combattants » ;
et la clique Melkonian-Toranian-Minassian n’était, en fait, nullement opposée
aux tueries dans les lieux publics : voir ci-dessous]. Pourtant,
Chicheil et ses flics n’ont pas changé d’opinion : pour eux, tout militant
[lire : terroriste] arménien
était par nature aussi sanguinaire et sans principe qu’Hagopian ; et que l’opposition
proclamée par Sishko et Monte [uniquement
après la scission de 1983] au terrorisme aveugle n’était qu’un prétexte
pour la lutte pour le pouvoir au sein de l’Armée secrète [arménienne pour la libération de l’Arménie, ASALA].
Sishko décida tourner le cynisme des flics à l’avantage de Monte. Faisant
appel à tous ses talents d’acteur, qui sont considérables, le Marseillais entra dans une cabine téléphonique, quelque part en
Yougoslavie, et grogna en s’adressant aux fonctionnaires français, à travers ces
câbles à longue distance : si Monte était envoyé aux États-Unis, gronda-t-il,
les Parisiens “nageraient dans le sang”. Et puisque lui, Sishko, avait été
condamné à perpétuité, il se moquait bien de mourir en posant des bombes.
Ou du moins, c’est qu’il a prétendu en parlant aux autorités françaises. En
réalité, Shishko n’avait ni les moyens, ni l’envie de mettre cette menace à
exécution. »
Les moyens sûrement pas, mais l’envie, c’est différent : les attentats
de l’ASALA dans des lieux publics, destinés à faire un maximum de victimes, ont
commencé en 1980 ; la scission n’a eu lieu que trois ans plus tard ;
l’attentat d’Orly, perpétré le 15 juillet 1983 (le lendemain de la scission au
Liban) avait
été annoncé (avec jubilation), dès le 19 janvier de la même année, par le néofasciste
Patrick Devedjian, membre de fait de l’ASALA (donc, les Melkonian, les
Minassian et consorts étaient donc forcément au courant eux aussi). Sur l’inanité
sur la thèse selon laquelle ceux qui firent scission de l’ASALA en 1983 étaient
moins sanguinaires que les autres :
Monte
Melkonian : assassin d’enfant, criminel de guerre, héros national arménien
Quand
Jean-Marc « Ara » Toranian menaçait d’attentats la France de la première
cohabitation (1986)
La
justification insidieuse ou explicite de l’attentat d’Orly dans la presse
arménienne de France
Les
rapports très changeants de Jean-Marc « Ara » Toranian avec des « fascistes »
Quand
Jean-Marc « Ara » Toranian reprochait à la FRA de ne pas être assez terroriste
(1981)
Lire aussi :
La
coopération des terroristes arméniens de l'ASALA avec les services secrets de
Kadhafi
L’attentat
commis par l’ASALA et le groupe Carlos contre la Maison de France à Berlin, en
1983
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