mardi 2 juin 2020

Franck « Mourad » Papazian et l’apologie du terrorisme arménien




Franck « Mourad » Papazian est coprésident du Conseil de coordination des associations arméniennes de France (CCAF) depuis 2010, l’autre étant son cousin germain Jean-Marc « Ara » Toranian, dont nous avons parlé la dernière fois. En 2015, il est devenu membre du bureau mondial de son parti, la Fédération révolutionnaire arménienne (FRA, dont il avait déjà été le coprésident pour l’Europe occidentale), puis reconduit à ce poste en 2019. Le premier engagement significatif de M. Papazian en politique fut en faveur du terrorisme, et plus précisément de la branche terroriste de la FRA, les Commandos des justiciers du génocide arménien (CJGA), rebaptisés Armée révolutionnaire arménienne (ARA) en 1983. Deux preuves (parmi d’autres) sont apportées ci-dessous. Ensuite, il sera expliqué quel est l’héritage contemporain de cet engagement.

Franck « Mourad » Papazian, compte-rendu du procès de Max Hraïr Kilndjian devant la cour d’assises d’Aix-en-Provence pour tentative d’assassinat sur l’ambassadeur de Turquie à Berne, Haïastan, février 1982, p. 14 :
« Pendant une demi-heure, des lamentations [sic] et des slogans : “Libérez Kilndjian.”
Lorsque les avocats de la défense [Patrick Devedjian et Henri Leclerc] ont pris la parole, toute manifestation s’est interrompue afin de ne pas gêner leur plaidoirie [contrairement, donc, à ce qui s’était passé durant la plaidoirie de l’avocat de la partie civile, Alain Vidal-Naquet[1]]. […]
À l’extérieur, nous étions tous conscients de la gravité du moment que nous vivions. Les jurés allaient délibérer. D’un coup, la foule a commencé à entonner des slogans. J’étais fou [sic], je n’avais jamais vécu cela. Deux heures de délibérations, deux heures de slogans incessants, seulement interrompus par des chants révolutionnaires.
Cette foule qui, pendant deux heures, a crié, a chanté, cette foule qui, pendant deux jours a soutenu Hraïr, cette foule consciente, concernée, passionnée, cette foule qui a su quand il fallait crier [sic], chanter ou garder le silence, a sûrement influencé la décision du jury. […]
Non Hraïr ne devait plus rester en prison. C’en était assez, c’était même trop. Et puis cette foule, non pas excitée, mais convaincue, quelle allait être sa réaction [en cas de condamnation supérieure au temps passé en détention provisoire] ? Mieux vaut ne pas y penser. »

Franck « Mourad » Papazian, « Coupable ou non, nous soutenons Hampig Sassounian », Haïastan, mai 1982, pp. 7-9 :
« Le mercredi 5 mai 1982, la F.R.A. NOR SEROUND [organisation de jeunesse du parti en France] et le Comité de soutien à H[ampig] Sassounian ont organisé une manifestation partant de la place Saint-Augustin (à Paris), pour aboutir à quelques mètres de l’ambassade des U.S.A.
Malgré les conditions météorologiques, 700 personnes [sic : la photographie d’illustration incite à penser que ce chiffre est exagéré] se sont mobilisées à l’appel de la F.R.A. NOR SEROUND.
Quelles étaient les intentions de cette manifestation ?
— Condamner l’attitude insupportable du gouvernement turc qui nie les droits les plus élémentaires du peuple arménien [allusion aux revendications territoriales de la FRA : le « génocide » est un prétexte, à peine évoqué ici].
— Dénoncer la complicité des U.S.A. qui aident, sans compter la Turquie, tant sur le plan financier que militaire [dans un contexte de guerre froide : c’est ce qui s’appelle choisir son camp].
Soutenir le [sic] “COMMANDO DES JUSTICIERS DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN” qui, est selon moi, la seule organisation armée qui lutte efficacement pour la résolution du problème arménien [d’où il suit que la critique que M. Papazian adressait, au printemps 1982, à l’Armée secrète arménienne pour la libération de l’Arménie tenait à un manque d’« efficacité »].
— Et, bien évidemment, nous étions là pour marquer notre indéfectible soutien à Hampig Sassounian.
[…]
Tout en justifiant l’action de Los Angeles [assassinat du consul général de Turquie, Kemal Arıkan] revendiquée par le “COMMANDO DES JUSTICIERS DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN”, tout en réaffirmant son soutien à Hampig Sassounian, la représentante de la F.R.A. NOR SEROUND affirme que “personne ne pourra étouffer la voix du peuple arménien, personne ne pourra arrêter notre peuple qui est prêt à tous les sacrifices pour reprendre ses terres” [sic !].
[…]
Cependant, si Hampig [Sassounian] est condamné à une lourde peine de réclusion criminelle [il a effectivement été condamné à perpétuité en 1984, peine confirmée en appel en 1986], nous multiplierons les actions de soutien à son égard. […]
La lutte de libération du peuple arménien entreprise depuis 1975 [avec l’assassinat des ambassadeurs de Turquie à Vienne et Paris] par le “ COMMANDO DES JUSTICIERS DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN” est en marche et RIEN [hurlement typographique dans l’original] ne pourra l’arrêter.
Mourad PAPAZIAN. »

Or, le 26 avril 2009, quand M. Papazian était coprésident de la FRA pour l’Europe occidentale, le nommé Mesrop Altounian, dirigeant du même parti, a prononcé, à Arnouville, un discours au nom de la FRA, c’est-à-dire donc, entre autres, de M. Papazian, où se trouvaient les propos suivants :

« Il a fallu attendre la fin des années 70 pour que de tels sujets soient abordés suite aux actions armées menées par de jeunes arméniens contre des représentations turques.
 À ce titre noublions pas que la cause arménienne a eu beaucoup de combattants et de martyrs qui ont donné de nombreuses victoires à la nation arménienne.
Noublions pas qu’à ce jour et depuis 1982, un jeune arménien qui avait alors 20 ans est toujours emprisonné aux Etats-Unis pour être accusé davoir exécuté un représentant turc à Los Angeles : il sappelle Hampig SASSOUNIAN. »

De même, en 2008, la FRA de l’agglomération lyonnaise a rendu hommage à ses cinq terroristes kamikazes, auteurs d’un attentat-suicide contre l’ambassade de Turquie à Lisbonne.


L’hommage a été réitéré depuis, notamment en 2013 (« Voici trente ans… Les cinq de Lisbonne », France-Arménie, juillet-août 2013, pp. 14-17) et en 2018. Or, outre le fait que la FRA est depuis sa création, en 1890, un parti hiérarchisé où l’indiscipline est punie aussi sévèrement que possible (elle était même, autrefois, punie de mort), M. Papazian n’a pas hésité à recourir à la méthode la plus radicale que la loi autorise, l’unique fois où il a considéré que la violence était une erreur tactique. En effet, il a demandé à l’énergumène (alors membre de la FRA Nor Seround) qui avait agressé, en 2015, l’ambassadeur de Turquie à Paris, de s’excuser, car M. Papazian espérait encore que le président François Hollande ferait adopter une disposition législative interdisant de « contester l’existence du génocide arménien » et il pensait (à juste titre) que cette affaire compromettrait les tentatives de la FRA pour obtenir une telle disposition (effectivement votée en 2016, mais censurée en 2017 par le Conseil constitutionnel). Devant le refus du militant en question et le soutien de la plupart des dirigeants de la FRA Nor Seround à ce dernier, M. Papazian et ses subordonnés ont exclu tout le monde — créant chez les exclus une rancœur telle que même le retournement de la FRA en la faveur du militant poursuivi (et finalement condamné) ainsi que de son complice (condamné aussi), après la censure du Conseil constitutionnel, n’a pas conduit à une quelconque réconciliation.
Par conséquent, l’éloge d’Hampig Sassounian en 2009, les éloges de l’attentat-suicide de Lisbonne en 2013 et 2018 (pour ne citer que ces exemples) n’ont pu avoir lieu qu’avec sa pleine approbation, pour ne pas dire à son initiative.

Lire aussi :










[1] Comité de soutien à Max Kilndjian, Les Arméniens en cour d’assises. Terroristes ou résistants ?, Roquevaire, Parenthèses, 1983 (compte-rendu sténographique du procès), p. 156 : « Mouvement de salle, brouhaha de protestation. »

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