jeudi 4 juin 2020

La justification insidieuse ou explicite de l’attentat d’Orly dans la presse arménienne de France




L’attentat d’Orly a été commis le 15 juillet 1983 par l’Armée secrète arménienne pour la libération de l’Arménie (ASALA), faisant huit morts et une soixantaine de blessés, dont plusieurs estropiés à vie. Il est souvent prétendu que cet attentat fut « unanimement condamné par la communauté arménienne de France ». Ah vraiment ?

René Dzagoyan, « Le désespoir », Arménia, juillet-août 1983, p. 4 :
« Voilà donc, une fois de plus, que le nom d’arménien s’est tâché [sic : pour « taché »] de sang. À l’annonce de la nouvelle, la plupart d’entre nous ont frémi à l’horreur et l’ont condamnée, prouvant si c’était nécessaire que l’on est homme avant d’être arménien.
Nous ne parlerons pas de ce crime. Tous les qualificatifs ont déjà été employés et il n’est pas nécessaire d’ajouter le nôtre.
Une indignation de plus ne servirait à rien, sinon à oublier que derrière ce drame se cache un drame encore plus terrible :
Celui de notre responsabilité, à nous, arméniens, et celle des nations.
À qui la faute ? [en gras dans l’original]
[…]
Qui a semé le grain ?
Nous étions un peuple paisible qui ne demandait que “JUSTICE”, mais nous n’avions pas de voix, nous n’avions pas de mains.
Et les États, doucement, au fur et à mesure des années, nous rangeaient peu à peu dans les oubliettes de l’histoire.
Nous avons essayé le dialogue, mais personne ne nous a écoutés.
Nous avons essayé la patience, mais la patience n’a rien donné.
Certains, alors, ont essayé la violence. Et, qui peut le nier, la violence a porté ses fruits, car alors les journaux du monde entier ont parlé de la question arménienne. C’est ainsi que, pour la première fois dans notre histoire, notre nation a connu les vertus de la Force, non pas parce qu’elle l’aimait, mais parce qu’elle faisait parler d’elle.
Y aurait-il aujourd’hui un terrorisme arménien si les arméniens avaient obtenu “Justice” ?
Y aurait-il des attentats si les nations occidentales, au lieu de fermer complaisamment les yeux devant une Turquie Criminelle, avaient contraint cet État, par tous les moyens possibles, à reconnaître son crime ?
Y aurait-il des “Orly” si les États-Unis et d’autres pays encore, au lieu de tenir à bout de bras l’État ottoman, l’avaient forcé à rendre aux arméniens… pas grand-chose : Leur dignité ? »

« Éditorial », Hay Baykar, 11 mars 1985 :
« Un militant arménien vient d’être condamné à la réclusion criminelle à perpétuité [pour l’attentat d’Orly]. Ainsi la montée de la répression anti-arménienne que nous dénonçons inlassablement depuis des mois aura atteint, le dimanche 3 mars, à 3 heures du matin, son point culminant.
[…]
Ce scénario s’est reproduit avec Soner Nayir, lui aussi désigné à la vindicte publique au moment de son arrestation comme l’auteur de l’attentat d’Orly. […] Quant à Ohannès Semerci, simple porteur de valise, il aura lui aussi été sacrifié au nom à la fois que de la responsabilité collective, de la psychose antiterroriste gagnant actuellement le pays et sur l’autel du rapprochement franco-turc.
Ces trois condamnations constituent un nouveau coup porté à la cause arménienne. »

La haine antioccidentale (antifrançaise, notamment) et antiturque, la haine, au fond, tout ce qui n’est pas soi, s’exprime suffisamment dans ces deux textes pour que nul commentaire ne soit nécessaire. Deux mots cependant : Hay Baykar, pour mes lecteurs qui ne le sauraient pas déjà, était dirigé par Jean-Marc « Ara » Toranian ; et M. Dzaogyan, cité ci-dessus, écrit presque tous les mois dans Les Nouvelles d’Arménie magazine, mensuel dirigé par le même Toranian.

Lire aussi :






L’arménophilie de Lauro Mainardi (ou comment le thème de « l’abandon des Arméniens par les démocraties » se trouvait dans la littérature fasciste)



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