jeudi 30 septembre 2021

Soutien de la proposition de loi Boyer (inconstitutionnelle), Nicolas Sarkozy a été condamné pour financement illégal de campagne électorale

 


 

« Affaire Bygmalion : qui a été condamné et pourquoi ? », Lemonde.fr, 30 septembre 2021 :

« L’UMP est accusée d’avoir organisé un système de fausses factures afin que les dépenses de campagne de Nicolas Sarkozy pour l’élection présidentielle de 2012 restent inférieures au plafond autorisé par la loi.

Une partie des frais occasionnés par la campagne du candidat de la droite n’était pas réglée par l’Association pour le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy, comme cela aurait dû être le cas. Bygmalion, l’entreprise prestataire de la campagne, les facturait en réalité à l’UMP, au prétexte d’événements plus ou moins fictifs. Le principe permettait à la campagne de M. Sarkozy de ne pas dépasser le montant de dépenses autorisées, tout en bénéficiant de prestations (l’organisation de meetings notamment) indûment facturées au parti.

Officiellement, au lieu des meetings de campagne, ce sont donc des conventions thématiques organisées pour l’UMP qui ont été facturées. Les révélations successives dans la presse ont montré que ces dernières présentaient un coût largement exagéré. Certaines se sont révélées fictives, mais leurs participants – des élus de l’UMP – n’en ont gardé aucun souvenir, comme le racontait Libération en révélant l’affaire.

L’enquête des juges d’instruction a révélé que le prix réel des 44 meetings organisés par l’agence événementielle Bygmalion avait été drastiquement réduit – 80 % des factures ont disparu – et le reste réglé par l’UMP au nom de conventions fictives du parti.

Le Conseil constitutionnel, confirmant une décision de la Commission nationale des comptes de campagne et du financement de la vie politique, avait invalidé en juillet 2013 les comptes du candidat de l’UMP, constatant un dépassement des plafonds de dépenses autorisés – ce qui avait annulé le remboursement des frais de campagne. Le tribunal a constaté que le montant du dépassement des comptes de campagne de Nicolas Sarkozy était de 16 247 509 euros.

 

Qui a été jugé par le tribunal correctionnel ?

Les investigations, menées par trois juges parisiens – Serge Tournaire, Roger Le Loire et Renaud Van Ruymbeke – ont abouti à renvoyer devant le tribunal quatorze personnes.

 

Nicolas Sarkozy

L’ex-président de la République, candidat à sa réélection en 2012, était poursuivi pour « financement illégal de campagne électorale », puisqu’il en était le responsable pénal, et que le dépassement massif des dépenses a été documenté et établi par le procès et l’enquête.

 

Dans son ordonnance de renvoi, le juge d’instruction Serge Tournaire a considéré que si l’ancien président « a incontestablement bénéficié des fraudes qui lui ont permis de disposer de moyens bien supérieurs à ceux que la loi autorisait, l’enquête n’a pas établi qu’il les avait ordonnées, ni qu’il y avait participé, ni même qu’il en avait été informé ».

Mais l’accusation a estimé que M. Sarkozy avait laissé filer les dépenses, malgré plusieurs alertes claires sur les risques de dépassement, et donc « incontestablement » bénéficié de la fraude, qui lui a permis de disposer de « moyens bien supérieurs » à ce qu’autorisait la loi à l’époque.

Nicolas Sarkozy, reconnu coupable de « financement illégal de campagne », a été condamné le 30 septembre à un an de prison ferme. Sa peine devrait être aménagée en détention à domicile sous surveillance électronique. Son avocat a annoncé qu’il ferait appel de cette décision. »

 

Rappelons que la proposition de loi Boyer, censurée par le Conseil constitutionnel, est contemporaine des pratiques illicites qui ont valu aux comptes de campagne de M. Sarkozy d’être rejetés par le Conseil constitutionnel en 2013, puis (pour les plus graves, découvertes après coup, grâce aux aveux de Jérôme Lavrilleux, ancien directeur adjoint de la campagne de M. Sarkozy en 2012) de provoquer l’ouverture d’une information judiciaire en 2014.

 

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mercredi 29 septembre 2021

La stratégie de la tension et de la provocation menée par les nationalistes arméniens dans les années 1890

 Emblème du parti Hintchak

 

Comte Armand de Cholet, Arménie, Kurdistan et Mésopotamie, Paris, Plon, 1892, pp. 106-107 :

« Le samedi, dix janvier [1891], malgré la neige et le froid, nous abordons résolument la route d’Erzeroum, et, après avoir long pendant une grande partie de la journée la rive droite de Kizil-Ermak et à travers une région aride et tourmentée, nous arrivons le soir au village de Ghévré. À peine sommes-nous installés dans la maison du moukhtar (maire) et nos gendarmes d’escorte nous ont-ils quittés un instant pour aller soigner leurs chevaux, que les Arméniens qui nous entourent commencent se lamenter de terrible manière sur leur malheureux sort, déplorant les mesures, iniques, disent-ils, que le gouvernement prend leur égard, et finalement nous conjurent de leur venir en aide et de remettre au vali [préfet] une supplique en leur faveur. Ils se jurent innocents de toute conspiration, incapables de méditer quelque rébellion et nous sommes sur le point d’acquiescer à leur demande, quand nous apprenons au contraire qu’ils ont été des plus compromis lors de la dernière tentative d’insurrection, qu’on a trouvé chez eux des armes de guerre soigneusement cachées, des munitions adroitement dissimules, que leurs noms enfin figuraient dans les papiers saisis l’année précédente, qui indiquaient tout au long le grade ou la fonction dévolus à chacun d’eux en cas de révolte. Le propriétaire de la maison que nous habitons est lui-même en prison à Sivas depuis quatre mois, dénoncé par d’autres conjurés, et, en présence de ces nouveaux renseignements, nous ne pouvons que donner à ceux qui nous environnent les meilleurs conseils de sagesse et de prudence, avec la promesse de demander au vali d’user d’indulgence l’égard de ceux qu’il retient prisonniers. »

 

William L. Langer (directeur du département d’histoire de Harvard, directeur adjoint de la CIA de 1950 à 1952), The Diplomacy of Imperialism. 1890-1902, New York, Alfred A. Knopf, 1960 :

« Les ambassadeurs à Istanbul ne mirent pas longtemps à suivre le développement de cette agitation. Dès 1888, le représentant anglais rapporta la présence de révolutionnaires [arméniens] et la saisie d’écrits séditieux. Des affiches révolutionnaires furent placardées dans les villes, et de nombreux Arméniens riches furent soumis au chantage, forcés de contribuer financièrement à la cause [nationaliste].

Les Européens présents en Turquie s’accordaient à dire que le but immédiat des agitateurs était de mettre du désordre, de susciter des représailles inhumaines, et ainsi de provoquer l’intervention des puissances. Pour cette raison, disait-on, ils opéraient dans de préférence dans des régions où les Arméniens étaient une minorité sans espoir, et où les représailles seraient certaines. Un des révolutionnaires dit au Dr Hamlin, fondateur du Robert College, que les bandes hintchakistes attendaient l’occasion propice pour se jeter sur les Turcs et les Kurdes, les tuer, incendier leurs villages et s’enfuir ensuite dans les montagnes. Mis en rage, les musulmans fondraient alors sur les Arméniens sans défense et les massacreraient avec une telle barbarie que la Russie envahirait le pays au nom de l’humanité et de la civilisation chrétienne et en prendrait possession. Quand le missionnaire horrifié s’écria que ce projet était le plus atroce et le plus infernal qui ne se fût jamais vu, la réponse fut : “Assurément, cela peut vous paraître ainsi, mais nous, les Arméniens, nous sommes décidés à conquérir notre liberté. C’est parce qu’elle a entendu parler des atrocités bulgares que l’Europe a libéré la Bulgarie. Quand des millions de femmes et d’enfants auront fait entendre leurs plaintes et versé leur sang, elle finira par entendre aussi notre cri... Nous sommes désespérés. Nous allons le faire.”

Les troubles sérieux commencèrent en 1890, à Erzurum, et du sang fut versé. […]

Il n’est pas nécessaire d’avoir une vive imagination pour se figurer la réaction des Turcs face à l’agitation des révolutionnaires. Ils avaient constamment à l’esprit, sinon la révolte des Grecs, du moins l’insurrection [de 1876] en Bulgarie et la désastreuse intervention de la Russie et autres grandes puissances. […]

Ceci, au moins, ne peut pas être nié : les révolutionnaires préparaient une grande conflagration, et qu’ils suscitaient beaucoup d’inquiétude de la part du sultan et de ses ministres. […] Nul ne pourrait blâmer le gouvernement [ottoman] pour avoir anticipé de grands troubles, et pour avoir pris ses précautions. Probablement pour contrecarrer les efforts entrepris afin de rallier les Kurdes au mouvement [révolutionnaire arménien], le sultan organisa, en 1891, les tribus dans les fameux régiments Hamidié, sur le modèle des brigades russes de Cosaques, et qui devaient théoriquement servir à la défense des frontières. […] S’installant à partir de 1892, les régiments Hamidié, quelquefois aidés par des troupes régulières, commencèrent à attaquer les établissements arméniens, à brûler les maisons, à détruire les cultures et à s’en prendre aux habitants.

Et ainsi les révolutionnaires commencèrent à obtenir ce qu’ils désiraient : des représailles. Cela n’avait aucune importance, pour eux, que des gens parfaitement innocents souffrissent ainsi, pour la réalisation d’un programme décidé par un groupe installé à Genève ou Athènes, un groupe qui n’avait jamais reçu aucun mandat de la communauté arménienne. […] [David] Hogarth [archéologue britannique] parle de certains Arméniens, dans les provinces [anatoliennes], qui ont dit qu’ils souhaitaient que les patriotes les laissassent tranquilles. Mais ce gens-là ne furent jamais consultés. Qu’ils le veuillent ou non, ils étaient destinés par d’autres à être sacrifiés ; leurs vies étaient le prix à payer pour la réalisation de l’État national-socialiste fantasmé par les fanatiques. » (pp. 157-160)

« M. Elliot, l’un des consuls britanniques qui visita le camp [de la Fédération révolutionnaire arménienne] en Perse en mai 1897, constata qu’il y avait quelque quinze cents de ces Arméniens vivant avec les habitants. “Il est clair”, rapporta-t-il, que les meneurs de ces hommes ne sont, en aucune manière, des patriotes, mais des voyous téméraires et dissolus.” En août, deux grands groupes [de membres de la FRA] prirent par surprise un camp kurde et tuèrent ou mutilèrent avec barbarie les hommes, les femmes et les enfants. Au même moment, il y eut de nouveaux attentats à la bombe à Constantinople, et les ambassadeurs [des grandes puissances] furent avertis que si les puissances refusaient d’agir, les révolutionnaires [arméniens] mettraient à exécution un projet “qui sera bien plus terrible que celui du grand assassin [surnom donné par ses ennemis au sultan Abdülhamit II], un projet qui les terrifie eux-mêmes.” Mais les puissances ne bougèrent pas. Peut-être commençaient-elles à réaliser que les révolutionnaires [arméniens], qui étaient si généreux quand il s’agissait de sacrifier les autres, exploitaient simplement les intérêts des nations chrétiennes, et peut-être avaient-elles appris plus elles interféraient, plus, côté turc, les massacres et les représailles empiraient. Depuis que la question des réformes avait été mise de côté, les Turcs se comportaient bien. Le vali [préfet] de Van avait réduit à néant tous les efforts de la part des musulmans pour venger le massacre des Kurdes en août [1897]. Progressivement, les révolutionnaires eux-mêmes réalisèrent que l’Europe en avait fini avec eux. On entendit de moins en moins parler de la question arménienne, et, à la fin de 1897, on peut dire que l’orage était passé. » (pp. 349-350)

 

Gaston Auboyneau (directeur général adjoint de la Banque ottomane), La Journée du 26 août à la Banque impériale ottomane, Villeurbanne, Imprimerie Chaix, 1912 (notes prises sur le moment par l’auteur) :

« [Après la fin de la prise d’otages], dans le sous-sol, nous trouvons un sac contenant de la dynamite ; nous le pesons : 11 kg 400 grammes ; des mèches, 45 bombes sphériques hérissées de capsules, 25 cartouches cylindriques de dynamite, et tout un assortiment de cartouches de revolvers. Nous dressons un procès-verbal de notre trouvaille, que nous consignons aux mains d’un officier du génie et qu’un fourgon emporte à Tophané.

Nous avons chez nous trois morts et six blessés, à la Régie deux morts.

Cent quarante personnes étaient enfermées à la Banque.

[…]

À 9 heures du matin, tout est en ordre, tout est propre, les vitres sont remises : la banque ouvre ses portes et l’on a presque oublié le cauchemar d’hier.

 

Jeudi, 27 août

Que s’est-il donc passé pendant mon absence [pendant qu’Auboyneau négociait à l’extérieur, notamment avec le gouvernement ottoman] ? MM. Wulfing et Pangiri, dont la conduite a été admirable, me le racontent par le menu, pendant que l’on met un peu d’ordre partout.

Une certaine tranquillité suivit mon départ et l’on entendit plus de coups de feu. Nos employés, par précaution, s’étaient couchés par terre, de crainte qu’en passant devant les fenêtres, quelque balle ne vînt les atteindre.

Les chefs arméniens eux-mêmes se tenaient tranquilles et l’un d’eux, [Armen] Garo [Garéguine Pasdermadjian], vint s’entretenir avec M. Wulfing. […]

Tout cela avait été bien étudié et bien organisé : pendant qu’il envahissait, lui, la Banque, la révolte avait éclaté sur sept points différents de la capitaine. Le but des Arméniens, ajoutait Garo, était de ruiner Constantinople commercialement et financièrement, en provoquant toujours de nouvelles émeutes. Ils avaient cru devoir s’emparer tout d’abord de la Banque, estimant que celle-ci, par la position qu’elle occupe, intéresse non seulement le gouvernement ottoman mais aussi toutes les puissances. Il prétendait que, maître de la Banque d’État, il pourrait exercer une pression suffisante sur le gouvernement [ottoman] et sur les ambassades et obtiendrait que les ambassadeurs eux-mêmes vinssent à lui pour lui donner par écrit l’assurance que les réformes sollicitées seraient obtenues. Que si ces garanties n’étaient pas données, ses camarades et lui persisteraient dans leur dessein d’anéantir la Banque et tous ceux qui s’y trouvaient.

Comme M. Wulfing signalait à Garo les milliers de victimes que son exploit ferait à Constantinople, l’Arménien répondit avec le plus grand calme : “Plus de victimes il y aura, mieux cela vaudra pour notre cause.” » (pp. 26-28)

« Barker, qui a passé plusieurs heures avec eux, les a trouvés heureux d’apprendre que nombreuses ont été les victimes. “Plus il y aura de morts, plus il y aura de sang versé, plus près nous serons du succès de notre cause, car l’Europe sera obligée d’intervenir.” » (p. 34)




 

« La dynamite à Constantinople », Le Temps, 20 août 1897, p. 2 :

« Hier [Le Temps était un journal de l’après-midi, daté du lendemain : il s’agit donc du 18 août 1897] dans l’après-midi, près de la préfecture de police à Péra, a été lancée une bombe qui n’a pas fait explosion. En même temps, on a arrêté à Galata, près de la Banque ottomane [cette même banque attaquée un an avant…], deux individus suspects vêtus à l’européenne, qui portaient de la dynamite.

Une explosion à la dynamite s’est produite dans une rue adjacente qui conduit du palais du grand vizir au palais du conseil d’Etat ; les fenêtres volèrent en éclats et les projectiles causèrent quelques dégâts. On parle aussi de quelques blessés. On désigne, comme auteurs de l’attentat, des Arméniens.

Une panique a suivi ces incidents. Les magasins se sont fermés puis ils ont été bientôt rouverts. À six heures du soir le calme régnait partout.

L’ambassade ottomane à Paris a reçu une dépêche est dit confirmant la nouvelle de ces explosions. Il y est dit que dans la journée d’hier, les fanatiques arméniens ont lancé des bombes de dynamite sur deux points de Galata ; mais que ces engins n’ont atteint personne. Un des malfaiteurs a été arrêté.

Un autre anarchiste a jeté au même moment, près des bâtiments ministériels, une bombe qui a blessé plusieurs personnes. ·

Les autorités de la capitale ont pris toutes les mesures nécessaires pour assurer le maintien de l’ordre et la tranquillité publique. »

 

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lundi 27 septembre 2021

1897 : le choc entre le loyalisme juif à l’État ottoman et l’alliance gréco-arménienne

 


 

Paul Dumont, « La structure sociale de la communauté juive de Salonique à la fin du dix-neuvième siècle », Revue historique, n° 534, avril-juin 1980, p. 387 :

« Les polémiques suscitées par l’affaire Dreyfus commençaient à peine à s’atténuer lorsque, en avril 1897, la guerre éclata entre la Turquie et la Grèce. Cet événement allait aussitôt raviver les dissensions au sein de la population salonicienne. D’ordinaire pleins de circonspection, les Israélites s’étaient dès le début des hostilités laissés emporter par leur zèle loyaliste. Ils avaient pris une part importante à la souscription ouverte pour la réorganisation de l’armée ottomane et avaient multiplié les gestes spectaculaires de dévouement à l’Empire. C’est ainsi, en particulier, qu’à l’annonce des premières victoires remportées par la Turquie, la communauté avait organisé sur ordre du Grand-Rabbin de Constantinople il est vrai des actions de grâce pour louer Dieu du succès qu’Il venait d’accorder aux généraux du sultan. Chez les Grecs, ces manifestations de patriotisme provoquèrent bien entendu une immense consternation. Dans l’immédiat, les journaux de Salonique n’étaient pas en mesure de monter à l’assaut, mais en territoire hellène, la presse se montra implacable. L’Acropolis du 2 mai 1897 alla jusqu’à prétendre que les Juifs de Salonique, perdant toute retenue, crachaient au visage des femmes chrétiennes et profanaient les églises. »

 

Julia Philips Cohen, « “Zeal and Noise”. Jewish Imperial Allegiance and the Greco-Ottoman War of 1897 », dans Michael M. Laskie et Yaakov Lev (dir.), The Divergence of Judaism and Islam, Gainesville, University Press of Florida, 2011, pp. 29-50 :

« Des Juifs se joignirent aux efforts organisés par des groupes de femmes, d’hommes et de jeunes gens musulmans à Salonique. En particulier, ils commencèrent à participer aux nouveaux projets patriotiques, tels que l’organisation du Croissant rouge, récemment créée. Quand des souscriptions pour les efforts du Croissant rouge [en faveur de soldats ottomans blessés] sont parues dans la presse, des noms de philanthropes juifs figuraient régulièrement à côté de ceux de philanthropes musulmans. Les journaux ont également écrit sur la façon dont les sociétés de femmes juives envoyaient de l’argent aux hôpitaux de campagne, organisés près du front. Vers la même époque, un groupe des jeunes juifs ont commencé à collecter de l’argent pour faire envoyer des lits sur le front, une autre action parallèle aux projets du Croissant-Rouge. Bientôt des nouvelles parurent, selon lesquelles des médecins juifs de Vienne et des étudiants en médecine, Juifs ottomans, récemment rentrés de leurs études à Paris se portèrent volontaires pour soigner dans la région frontalière où se déroulaient les combats. Les souscriptions en faveur des musulmans expulsés de Crète ont été constamment abondées par des dons faits par des Juifs aussi bien que par des musulmans. La presse juive de Salonique a également publié des notes du grand rabbin de Crète, racontant comment 100 des familles musulmanes de cette île ont trouvé refuge dans les maisons de Juifs locaux. » (pp. 31-32)

« Ce jour-là [28 avril 1897], alors qu’un train chargé de prisonniers grecs blessés revenait de le champ de bataille a traversé Salonique, des musulmans et des juifs locaux se seraient rassemblés à la gare et ont commencé à narguer les passagers du train. » (p. 35)

« Les Juifs de la ville [İzmir] et de ses environs ont organisé des cérémonies spéciales pour leur armée [l’armée ottomane] et ont prié pour sa victoire rapide et totale. Ils ont également prononcé des discours publics en ladino et en turc soulignant leur dévouement à la cause et à leur État ; beaucoup ont donné de l’argent, des vêtements ou de fournitures à des fonds créés pour les soldats majoritairement musulmans de l’armée ottomane.

En fait, cette forme particulière d’identification s’est concrétisée par la participation juive aux activités du Croissant-Rouge et à d’autres projets visant directement à aider les populations musulmanes déplacées par la guerre, notamment celles de Crète. L’alignement avec les musulmans ottomans locaux et même éloignés était devenu une partie intégrante de la façon dont les Juifs ottomans ont exprimé leur loyauté à l’empire pendant la guerre, à İzmir comme à Salonique. » (pp. 40-41)

 

Archag Tchobanian, « L’Arménie, avant-garde de la civilisation gréco-latine en Orient », dans La Renaissance de l’Orient, Paris, Ernest Leroux, 1919, p. 14 :

« Les luttes grecques pour l’indépendance ont trouvé jadis parmi nous [les nationalistes arméniens] l’accueil le plus enthousiaste, et les héros de cette épopée sont des plus populaires chez nous ; la révolte crétoise nous passionna autant que nos propres luttes menées contre la même tyrannie ; à la guerre gréco-turque de 1897, des volontaires arméniens allèrent se battre dans l’armée grecque contre le Turc, et la joie que nous éprouvâmes lorsque la Crète fut libérée du joug ottoman se renforçait en nous par la pensée que le discrédit jeté sur la Turquie par le retentissant martyre de l’Arménie sous Abdul-Hamid avait contribué à cette délivrance […] »

 

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mardi 21 septembre 2021

Le témoignage d’un évêque arménien sur les assassinats et les dévastations commis par les forces russes en 1877

 


 

Docteur L. Bernhard, Les Atrocités russes en Bulgarie et en Arménie pendant la guerre de 1877, Berlin, Albert Abelsdorff, 1878, pp. 58-59 :

« Communication faite par le Prélat arménien de Bajézid [Doğubeyazıt] et de Utch-Kilissé [Etchmiadzin] au Patriarcat arménien à Constantinople.

Les chefs kurdes étaient mes amis et protégeaient notre monastère. Ils ont été tués [par l’envahisseur russe]. Dès lors, vous comprenez que nous avions tout à craindre de la vengeance de leurs camarades, et que le jour où le général Derghougassof nous a quittés, nous avons dû partir avec lui. Plût au ciel qu'il ne fût jamais venu ou qu'il nous eût avertis plus tôt ! Au reste il y a des choses que je ne dirai pas; mais les irréguliers russes ne valent pas mieux que les Kurdes, et nous avons eu autant à souffrir des Lesguiens [Caucasiens] que n'importe qui…

Et maintenant, voyez, ajouta-t-il, en me montrant par l'embrasure d'une fenêtre le triste spectacle que j'avais sous les yeux depuis deux jours, — voyez ! nous avions des maisons, des champs, de tout cela il ne nous reste rien.

Nous avions emmené notre bétail ; on nous a presque tout pris. Oh ! mon Dieu ; les Arméniens n'ont pas de pardon !”

Quarante-cinq chefs de Kurdes ont été tués [par des Russes] dans le monastère de St. Jean — Sourp Ohannès — à Bajazid [Doğubeyazıt] ; en outre toute la dépendance dudit monastère a été incendiée ; et le Prélat susmentionné a été trainé par les Russes, par suite de son refus de partir. Tous les objets sacrés et les manuscrits précieux ont été détruits ou enlevés.

Le Père Arakel, supérieur de la Congrégation de St. Jean, a été tué.

Les Cosaques ont incendié toutes les maisons vacantes appartenant tant aux musulmans qu'aux Chrétiens. »

 

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mardi 14 septembre 2021

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Extrait du Petit Parisien, 20 septembre 1922, p. 2 


« Le Proche-Orient et le pétrole », Bulletin de la Société française des ingénieurs coloniaux, n° 79, 1er trimestre 1923, pp. 117-130 :

« Le Proche Orient a pour nous une importance majeure, et c’est pourquoi nous jugeons utile de donner connaissance à nos collègues du récit vécu que nous envoie l’un des nôtres, M. Camille Toureille-bey, de la prise de Smyrne par Mustapha Kenial et de l’incendie de la ville par les Grecs et les Arméniens.

“Depuis le 19 août., l’offensive de Mustapha Kemal s’est déclenchée et s’est étendue progressivement.

Fidèles à leurs habitudes de dissimulation et de mensonges, les Grecs ont tout d’abord caché ces attaques, puis ont travesti en victoires partielles leurs défaites successives, dans leurs communiqués aux Smyrniotes.

Les nouvelles les plus proches de la vérité arrivaient rares et laconiques par les journaux d’Europe.

La censure sévissait plus que jamais.

Le 27 août, le public apprit, à Smyrne, par des employés du chemin de fer, que les Turcs avaient capturé deux trains de munitions, de vivres et de renforts grecs, et que réellement la débâcle commençait.

Les officiers grecs ont prudemment lâché pied les premiers. Les soldats, laissés sans vivres et sans direction, ont commencé à fuir vers Smyrne. Mais, fidèles aux leçons allemandes, ils n’ont pas, en reculant, manqué d’incendier tous les villages, après les avoir pillés, ainsi que toutes les fermes et les maisons isolées, après avoir volé tout ce qu’ils ont pu emporter [au moins dans le cas de villes telles qu’Eskişehir et Aydın, l’incendie a été méthodiquement organisé par le commandement grec].

Tout a été saccagé, quel qu’en fût le propriétaire, Grec, Turc, ou autre, puis incendié. Dans les habitations turques, les habitants ont été, autant que les fuyards l’ont pu, brûlés vifs, sans miséricorde, hommes, femmes, enfants. Ils ont incendié de même les importantes et célèbres fabriques de tapis d’Ouchak.

Le produit de leurs vols chargé sur leurs épaules ou sur des animaux également volés, ils l’offraient à vil prix en arrivant aux abords de Smyrne, notamment à Cordélio, banlieue de la ville, à 15 kilomètres par le tour du golfe, ou à 4 kilomètres à vol d’oiseau. Ils apportaient ainsi tapis, couvertures, vêtements, linge, chaussures, volailles, moutons, chèvres, ânes, mulets, chevaux.

En cours de route, ils avaient détruit les splendides récoltes de raisin et de figues, richesse de Smyrne. Ils se vantaient d’avoir détruit tout ce qu’ils n’avaient pu emporter.

Souvent, enfin, ils abandonnaient leurs vols sur les roules, et jetaient, en même temps leurs munitions, dont une grande quantité fut retrouvée dans les jardins et les rues de Cordélio. Ils vendaient leurs armes quand ils trouvaient acheteurs, moyennant une livre lurque, 7 fr. 70 environ.

Les 4 et 5 septembre, des aéroplanes turcs, survolant les lignes grecques et les bandes de fuyards, jetaient de petits papiers exhortant les Grecs à se retirer sans rien détruire, et surtout sans rien incendier, et, à respecter la propriété privée, grecque aussi bien que turque.

Les fuyards qui passaient à Cordélio racontaient que leurs officiers, avant de fuir, leur avaient dit que, parmi les troupes turques, se trouvaient des soldats français, italiens, anglais, et, beaucoup de bolcheviks [affirmations qui relèvent du mensonge, pour ne pas dire de la mythomanie].

C’est alors qu’ils se sont enfuis également, en conspuant leur pays et leur fameux roi Constantin, et en acclamant Lénine et Trotsky.

La population de Cordélio, premier point de contact avec les fuyards et les déserteurs grecs, et comptant beaucoup de Grecs, a demandé, dès le 4 septembre, aide et protection à la police grecque. Celle-ci a été renforcée. Mais de nombreux vols et viols ont été commis par la soldatesque, ce qui fait juger de ce qu’ont pu faire les Grecs en Anatolie, avant d’incendier les habitations.

Cette protection n’a pas duré plus de vingt-quatre heures, car, le 6 septembre, la police de Cordélio a été rappelée à Smyrne, de même que celle de toutes les banlieues, nord et sud, de la ville.

Le 6 septembre, dans la soirée, et jusqu’au 7 septembre après-midi, les Grecs ont embarqué les hommes qu’ils ont pu réunir, les canons qu’ils avaient pu ramener, puis tout le personnel civil et militaire du port, de la douane, de la ville et du port. Les bateaux de guerre grecs Lemnos et Kilkis ont alors quitté le port de Smyrne, ainsi que les autres bateaux grecs moins importants, et se sont retirés, près de File de Chio, en pleine mer, hors du golfe de Smyrne.

Ils ont procédé à celle fuite en secret, laissant la ville sans police et sans administration.

Le 8 septembre, ce fut une ruée de toute la population grecque et arménienne et,’ de toute la lie de la ville, vers les dépôts d’approvisionnements de l’armée grecque, sis dans le quartier de la ‘Punta’, au nord de la ville, près de la gare du chemin de fer d’Aïdin. Les fuyards grecs pillèrent aussi, suivant, leur constante habitude, et les wagons de marchandises, remplis de bagages de réfugiés grecs d’Anatolie, à la gare voisine, n’échappèrent pas à cette curée.

Le même jour, les mêmes individus pillèrent les magasins du quartier commerçant nord de Smyrne, entre l’église grecque de Sainte-Fotini et le Bazar, véritable ville composée de magasins et de dépôts comme il n’en existe qu’en Orient, et qui renfermaient des marchandises d’une valeur de plusieurs centaines de millions de francs.

Les consuls, en présence de la défection grecque, firent, le 8 septembre, débarquer des bateaux de guerre des détachements ‘de marins. Les Anglais gardèrent leur consulat, la poste et les quais ; les Français, leur consulat, les banques françaises, la poste, le palais de l’Alliance française et les églises françaises ; les Italiens prirent, soin de leur consulat et des églises italiennes, des écoles et de la poste.

Depuis le 4 septembre, de foutes les villes, de tous les villages, de toutes les fermes, des habitations isolées, situées entre le golfe de Smyrne et le front de bataille, les populations, craignant à juste titre les exactions des troupes grecques en fuite, ainsi qu’elles l’avaient déjà fait en 1917, en 1919, 1920 et 1921, s’étaient enfuies, les unes, durant le jour, emportant ce qu’elles pouvaient, les autres, surprises en pleine nuit, à moitié vêtues, souvent pieds nus et les mains vides.

Ce furent d’abord des Turcs et des Grecs qui, craignant les fuyards Grecs, envahirent les trains venant à Smyrne, des différentes stations de la ligne Smyme-Kassaba et prolongements, d’Ouchak, où 2 000 maisons et les fabriques de tapis furent détruites, d’Afioum-Kara-Issar, d’Eskicheir, de Magnésia, etc.

[…]

Il faut dire que, lors de l’invasion grecque en Anatolie, l’armée grecque, se faisant consciemment l’exécutrice des basses vengeances de la colonie grecque de Smyrne et de sa banlieue, assassina froidement tous les Turcs qui lui étaient signalés comme hostiles à cette invasion, facilitée par la faiblesse des gouvernements alliés à l’égard de la politique dangereuse et incompréhensible de l’Angleterre.

Il y eut aussi à Smyrne quelques soulèvements turcs, férocement réprimés par les Grecs.

De tout cela, les Turcs avaient gardé le souvenir, et connaissaient les auteurs responsables de ces boucheries sauvages. Ceux-ci savaient qu’ils devraient personnellement payer, si les Turcs reprenaient Smyrne.

Aussi, dès le mois de juin [1922], le Comité micrasiatique, composé de Grecs et d’Arméniens, et beaucoup de propriétaires grecs et arméniens, ne cachaient pas leur décision formelle et irrévocable d’incendier chacun sa maison, quels qu’en fussent les occupants, si la Grèce devait, d’une façon quelconque, évacuer Smyrne et la région, et renoncer à la souveraineté de la riche province d’Anatolie. C’était un fait connu.

Les propriétaires grecs consciencieux devaient préalablement dénoncer leurs contrats d’assurance, afin de n’être pas accusés d’avoir mis le feu à leurs maisons pour en tirer profit, ainsi que le faisaient communément les commerçants grecs à chaque instant, et de tout temps, à Smyrne.

L’armée grecque avait commencé l’exécution de ce terrible programme en incendiant villes, villages, fermes et récoltes pendant sa déroute.

Dès le 7 septembre, de nombreux habitants de Smyrne, constatant que la ville, depuis le départ des autorités hellènes, était livrée aux pillards, voleurs, violeurs incendiaires grecs, prirent peur pour eux-mêmes, et se réfugièrent dans les locaux mis à leur disposition par les autorités consulaires françaises et italiennes, ou dans les couvents et les églises.

Beaucoup demandèrent asile aux bateaux et aux paquebots qui se trouvaient dans le golfe, tels que la Sardegna et des bateaux japonais et hollandais.

Le samedi 9 septembre, à midi, les premières troupes kémalistes arrivèrent à Smyrne et défilèrent sur les quais.

Vers 11 heures et demie, u. fort groupe de Turcs, venant de leur quartier, sis au sud de la ville, et qui est construit en amphithéâtre sur la montagne dominant Smyrne, descendit sur les quais, drapeaux turcs en tête, et se dirigea vers le nord de la ville, par où devaient venir les troupes kémalistes. Cette manifestation toute pacifique terrifia les nombreux réfugiés grecs qui occupaient les quais sur le bord de la mer. Des chalands, remorqués par des chaloupes de l’escadre anglaise, vinrent les prendre et les conduisirent le long du quai du port qui ferme celui-ci en face de la ville, à l’ouest et du côté opposé à celle-ci.

Les pauvres gens abandonnèrent tous leurs biens pour sauver leur vie, qu’ils croyaient, bien à tort, en péril.

Dans les rues parallèles et perpendiculaires aux quais, les magasins grecs, très nombreux, fermèrent rapidement leurs portes ; les soldats grecs rencontrés furent sommés par les passants de jeter leurs armes, et même de les briser. Quelques-uns, qui s’y refusaient, furent quelque peu houspillés par les civils, et s’empressèrent d’obéir lorsqu’ils apprirent que les kémalistes arrivaient, afin de ne pas être pris pour des combattants.

Les troupes, en effet, entrèrent et défilèrent sur les quais, se rendant au konak. Leur attitude était des plus pacifiques.

En tête, deux cents soldats sans armes poussaient, devant eux six moutons, puis venait un détachement de cavalerie commandé par un officier supérieur. Il était suivi d’un fort groupe de soldats grecs prisonniers, et terminé par une batterie d’artillerie. Derrière venaient, on ne sait pourquoi ni dans quel but, six policemen anglais, fameux protecteurs des minorités chrétiennes.

Pendant cette pacifique prise de possession, un énergumène arménien lança sur les troupes une grenade à main ou une bombe, qui ne fit aucun mal. La population jeta l’homme à l’eau, et la peur de représailles de la part des vainqueurs augmenta, sur les quais, la panique qui faisait fuir les réfugiés sur les chalands.

Cet acte stupide fut simplement méprisé par la troupe kémaliste, mais il fut répété près du konak. Ce n’est qu’un peu plus tard que des coups de feu furent entendus du côté du konak, et l’on expliqua que des Arméniens, cachés derrière des dépôts de bois du Nord entassés sur les quais, avaient tiré ou lancé des bombes, et blessé des soldats kémalistes. A ce moment, ceux-ci ripostèrent et se défendirent.

Les Arméniens se renfermèrent chez eux, et dans leur église patriarcale, où ils avaient entassé toutes sortes d’armes, des grenades et des bombes incendiaires.

[…]

Les autorités kémalistes procédèrent à de nombreuses arrestations de personnes signalées comme dangereuses pour la sécurité des Turcs civils et des troupes d’occupation, et aussi dénoncées comme ayant servi d’indicateurs aux Grecs, lors de leur invasion armée de 1917 [1919].

A partir du 11 septembre après midi, et jusqu’au 13 septembre à 8 heures du matin, les communications terrestres et maritimes furent interdites entre Cordélio et Smyrne, pour empêcher la fuite des suspects que les. Turcs recherchaient; tout mouvement d’entrée et de sortie des bateaux de commerce dans le port fut également défendu.

[…]

À l’approche des Turcs, les Grecs pillards avaient fui de Cordélio, comme de Smyrne ; mais, dès le vendredi 8 sepLembrc, ceux-ci furent remplacés par une bande de brigands, de ‘Turcom’ [très probablement le « général » Torcom, membre de la Fédération révolutionnaire arménienne], composée d’Arméniens, de Grecs et de racaille sans nationalité bien définie, mais d’origine levantine. Cette bande partit du village turc Choukouyou, à l’ouest de Cordélio, et dévalisa les habitations longeant la voie ferrée entre Choukouyou et Pétrota, dans la direction de Smyrne, et, malmena les habitants. Mais la police civile turque tua les deux principaux chefs, tous deux Arméniens, un ou deux Grecs, et mit le reste de la bande en fuite.

Il est à remarquer qu’à Smyrne on trouva constamment des Arméniens mêlés aux Grecs toutes les fois que des actes de brigandage furent commis à la faveur des troubles, et chaque fois qu’il était possible de faire du mal aux Turcs. D’où des répressions parfaitement justifiées de la part des troupes kémalistes.

[…]

Le samedi 9 septembre, les troupes turques arrivèrent à Cordélio, où elles campèrent à l’ouest de la ville. Il en défila pendant plusieurs jours. Il est à noter que, presque chaque fois qu’un officier supérieur turc passait devant la maison de l’auteur de ces lignes, qui avait arboré un drapeau français, cet officier saluait militairement le drapeau.

[…]

Dans la soirée des 11 et 12 septembre, les Grecs, fidèles à leur moi d’ordre, pillèrent et incendièrent les villages de Bournaba, de Boudja et de Couldoudja, autour de Smyrne, et aussi quelques magasins de Haïrakii.

Justement ému de ces vols et incendies, le 11 septembre encore, l’auteur de ces lignes alla trouver le commandant adjoint de la police turque, auquel il demandait protection pour sa maison, déclarant qu’il n’était pas belligérant, qu’il possédait le titre de bey, était décoré des ordres turcs, et qu’enfin il était Français.

Le commandant se leva à cette dernière déclaration et salua militairement, disant que cette qualité suffisait pour que la maison fût protégée ; elle le fut, en effet, efficacement.

Les 11 et 12 septembre, à Smyrne, tous les magasins restèrent fermés. Il fut impossible d’obtenir la moindre nourriture : épiceries, boulangeries, restaurants, tout était clos. Partout les réfugiés affluaient dans les endroits qui leur étaient assignés. Les bateaux non militaires, italiens, japonais, hollandais, ancrés dans le port, donnaient asile à leurs nationaux. Les quais de Smyrne étaient fort sales, jonchés de débris de fusils. de literie, de malles éventrées, de linge, etc.

Le soir de ces deux jours, comme les soirs précédents, la population de Smyrne et de Cordélio a pu, au milieu de sa détresse, des misères qui s’augmentaient de la terreur d’un avenir incertain, entendre que l’amiral anglais, dont le vaisseau était ancré entre ces deux villes, du côté de la Pointe, dînait au son des airs les plus brillants de la musique du bord. Sur les rives, on volait et on violait ; les Grecs incendiaient.

C’est ainsi que l’Angleterre protège les minorités chrétiennes et prend sa part de leurs tristesses et de leurs souffrances.

On signalait de nombreux actes de provocation de la part des Arméniens à l’égard des Turcs. Ils s’étaient réfugiés en grand nombre dans leur église patriarcale, vaste édifice situé au milieu d’une grande cour entourée de hauts murs. Ils y avaient entassé des munitions de toutes sortes, des bombes incendiaires et des grenades à main. Ils refusaient de sortir, de se disperser, de rentrer paisiblement chez eux ; les exhortations des consuls alliés ne purent rien sur eux. Les Arméniens n’écoutent que leur clergé, ignorant, fanatique et stupide, qui les conduit toujours à la révolte imbécile et, par là, à la mort.

Les Turcs avaient cerné l’église et une partie du quartier arménien ; ils ne voulaient pas d’effusion de sang, mais ils voulaient assurer leur propre sécurité. Les Arméniens leur jetaient des grenades à main pardessus les murs, en réponse aux sommations qui leur étaient faites. Les Turcs reculaient devant l’action énergique qui s’imposait, en présence de cette rébellion armée, parce que, le vent régnant à Smyrne étant presque toujours nord ou nord-nord-ouest, ils risquaient d’atteindre le quartier turc, situé au sud-sud-est, derrière le quartier arménien.

[…]

A 14 heures et demie, de Cordélio on vit un incendie se déclarer à Smyrne, dans le quartier grec. A 15 heures, il y avait trois foyers très importants, assez distants les uns des autres, mais sur une même ligne. A 15 heures et demie, un quatrième incendie éclata, très intense, tout à fait au sud de la ville, au centre du quartier arménien, au pied du quartier turc.

Les Grecs et les Arméniens exécutaient fidèlement leur consigne de brûler leurs maisons avant de se retirer.

[…]

Les incendiaires avaient bien calculé leurs opérations. En commençant à allumer les feux vers 14 et 15 heures, l’incendie devait avoir acquis une certaine importance à 16 heures, moment où l’‘imbatte’ se produit à Smyrne, c’est-à-dire moment où le vent nord ou nord-nord-ouest commence à souffler. La force du veut s’accroît souvent jusqu’à 20 heures, puis elle tombe durant une heure, et s’élève ensuite en tempête.

De toute façon, ce vent devait souffler en temps utile pour porter le feu dans le quartier turc, qui s’étage, sur la montagne, en amphithéâtre, au sud-sud-est de la ville, précisément au-dessus des quartiers grecs et arméniens. De cette façon, les Grecs, obligés d’évacuer la ville, et les Arméniens, qui se croyaient également dans le même cas, réalisaient leur terrible projet, mais, par surcroît, ruinaient les Turcs en détruisant leur riche et populeux quartier.

Mais, terrible expiation, le vent, ce soir-là, a soufflé plein sud, et, s’élevant peu à peu, il a, de 20 à 22 heures, augmenté d’intensité ; il soufflait en tempête à partir de 22 heures.

Ce fait ne se produit pas dix fois par an à Smyrne, et les incendiaires ne pouvaient penser que l’exception se produirait précisément ce soir-là.

Il en est résulté que les richesses incalculables des Grecs et des Arméniens, dans toute la ville, où ils possédaient la presque totalité des dépôts et des magasins, ont été anéanties.

Mais, ce qui est infiniment plus triste encore que cette punition des vils incendiaires, c’est que tous les Européens ont été ainsi victimes de ces criminels.

À partir de 15 heures et demie on entendit des explosions provenant du quartier arménien, puis du quartier grec. La raison en est que, chez les uns et les autres, il se trouvait des bombes incendiaires, puis, à mesure que le feu gagnait les quartiers européens, les réserves de pétrole que chacun avait faites, en vue de l’hiver prochain, explosaient à leur tour.

A 17 heures, l’incendie s’étendit et augmenta d’intensité, attisé par le fort vent du sud. A 18 h 30, il y avait quatre immenses foyers d’incendie. On entendait de Cordélio les cris que poussaient les Smyrniotes qui fuyaient vers les quais. De fortes détonations étaient également entendues à mesure que le feu s’étendait. A 20 heures, les quatre brasiers n’en formaient plus qu’un seul, de plus d’un kilomètre de développement, et qui paraissait très profond. A 21 h 30, l’incendie, après des alternatives d’affaissements et de reprises, paraissait, à la suite d’effondrements d’édifices, diminuer d’int,ensit,é, et deux foyers principaux continuaient seuls à brûler intensément. A 22 heures, il se produisit une reprise soudaine du feu ; le vent, qui soufflait du sud au nord, augmenta de violence. On sentit que la ville était perdue.

[…]

Nous apprîmes ce jour-là, à bord de l’Edgar-Quinet, que le feu avait fait son apparition au quartier grec de Smyrne, dans une maison paraissant inhabitée ; un notable franc s’était mis à la tête des sapeurs-pompiers turcs de la ville, mais à peine le feu était-il attaqué que quatre ou cinq maisons plus loin, dans la même rue, une autre prenait feu sans cause apparente ; lorsqu’on voulut s’élancer vers cette maison c’est une troisième située près de la première qui prenait feu à son tour. C’était à renoncer d’y porter remède, en présence de semblable spontanéité apparente, et c’est ce qu’on fut obligé de faire.

La seule explication plausible est que des foyers avaient été préparés et munis de mèches. Il n’y avait alors personne dans la rue dont il s’agit. Il paraît en avoir été de même au quartier arménien ; c’est de là qu’ont été entendues les premières explosions. »

 

Lire aussi :

Le témoignage de Paul Grescovitch (chef d’une brigade de pompiers) sur l’incendie d’İzmir (« Smyrne ») en 1922

L’amiral Charles Dumesnil et Raymond Poincaré sur les causes de l’incendie d’İzmir (« Smyrne »)

Le consensus de la presse française pour attribuer l’incendie d’İzmir (« Smyrne ») aux nationalistes arméniens (1922)

Le soutien nationaliste arménien à l’irrédentisme grec-constantinien, massacreur de marins français et de civils turcs

Lothrop Stoddard : "Une puissante armée grecque (...) a commis des atrocités massives contre les habitants turcs"

L’évolution d’Émile Wetterlé sur la question arménienne et les Turcs

Le rapport de la Commission interalliée d'enquête sur l'occupation grecque de Smyrne et des territoires adjacents (1919)

La contribution française à la victoire de la Turquie kémaliste sur la Grèce constantinienne (1921-1922)

La grécophilie, l’arménophilie et l’antijudéomaçonnisme fort peu désintéressés de Michel Paillarès

samedi 11 septembre 2021

Bernard Jouanneau : défenseur de la « cause arménienne » et du conspirationniste Thierry Meyssan

 




Jugement du Tribunal de grande instance de Paris, 17e chambre, 15 novembre 2004 :

« DEMANDERESSE

COMITE DE DEFENSE DE LA CAUSE ARMENIENNE agissant par son

Président, M. Serge Harout MARDIROSSIAN.

17 rue Bleue

75009 PARIS

représenté par Me Patrick ARAPIAN, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire DI525, Me Serge TAVITIAN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant et Me Bernard JOUANNEAU, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire A96.

 

DÉFENDEURS

Monsieur Aydin Sezgin

représenté par Me Michel JEOL et Philippe BOUCHEZ EL GHOZI pour la SCP PAUL HASTINGS JANOFSKY & WALKER (EUROPE) LLP, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P177,

 

Société FRANCE-TÉLÉCOM SERVICES DE COMMUNICATION RESIDENTIELS venant aux droits de la société WANADOO

48 rue Camille DESMOULINS

92971 ISSY LES MOULINEAUX CEDEX 9

représentée par Me Bertrand POTOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire T0700

[…]

Vu l’assignation qu’a fait délivrer, en suite de cette autorisation, l’association COMITÉ DE DÉFENSE DE LA CAUSE ARMÉNIENNE (ci-après CDCA) à Aydin Sezgin par actes en date des 19 et 22 juillet 2004, par laquelle il est demandé au tribunal, sur le fondement des dispositions des articles 1382 et suivants du code civil, de condamner :

- chacun de ces deux défendeurs à supprimer, sur le site internet du consulat général de Turquie à PARIS (M. Sezgin consul général de Turquie à PARIS), accessible à l’adresse *toutes les pages -contenant des propos niant l’existence du génocide arménien- rangées sous la rubrique “ allégations arméniennes et faits historiques”, sous astreinte de 150 €par jour de retard à compter de la signification de la présente décision,

à supporter les frais de trois publications judiciaires, dans des journaux ou revues au choix de l’association demanderesse, dans la limite de 3 000 €par publication,

- la société WANADOO au paiement d’un euro à titre de dommages et intérêts,

- les défendeurs aux dépens et au paiement de la somme de 10 000 €sur le fondement des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

[…]

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, statuant publiquement par jugement contradictoire en premier ressort,

Fait droit à la fin de non-recevoir tirée des immunités consulaires définies par la convention de VIENNE du 24 avril 1963 ;

Dit en conséquence irrecevables les demandes visant Aydin Sezgin ;

Déboute l’association COMITÉ DE DÉFENSE DE LA CAUSE ARMÉNIENNE de ses demandes formées contre la société France TÉLÉCOM SERVICES DE COMMUNICATION RÉSIDENTIELS, venant aux droits et obligations de la société WANADOO ;

Rejette les demandes formées par Aydin Sezgin et la société France TÉLÉCOM SERVICES DE COMMUNICATION RÉSIDENTIELS sur le fondement des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne l’association COMITÉ DE DÉFENSE DE LA CAUSE ARMÉNIENNE aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 15 Novembre 2004 »

 

Communiqué du Conseil de coordination des associations arméniennes de France, 22 novembre 2008 :

« Appel aux Sénateurs : « Le négationnisme est un crime. Pour le punir JE veux une loi ! »

Par leur présence et leur prise de parole à la manifestation du samedi 22 novembre,

• Bernard-Henry Lévy, intellectuel, écrivain

[…]

Bernard Jouanneau, avocat, Président de “Mémoire 2000”

[…]

appellent le Sénat à faire barrage au négationnisme de l’Etat turc.

Le samedi 22 novembre à 15h00, le Conseil de Coordination des organisations Arméniennes de France (CCAF) organise un rassemblement républicain devant le Sénat. Cette mobilisation citoyenne s’inscrit dans le cadre du combat contre le négationnisme, pour le respect de la vérité historique.

[…]

Le CCAF estime qu’il ne doit plus être possible de faire preuve de négationnisme en France.

Le Sénat doit inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour de ses travaux. Les citoyens anti-négationnistes et iront jusqu’au bout de ce combat. »

ð  Aucun groupe sénatorial n’a jamais soutenu la proposition de loi en question. Présentée par une fraction minoritaire du groupe socialiste, elle a été rejetée, pour inconstitutionnalité criante, par le Sénat, le 4 mai 2011, à une large majorité.

 

« JUSTICE : Thierry Meyssan a été débouté de sa plainte en diffamation contre le journal “Le Monde” »Le Monde, 8 février 2004 :

« Thierry Meyssan, l'auteur de L'Effroyable imposture (Carnot éditions), a été débouté, lundi 2 février, de sa plainte en diffamation contre Le Monde, à la suite de l'éditorial du quotidien du 21 mars 2002, qui appuyait l'enquête parue le même jour, intitulée “Internet véhicule une rumeur extravagante sur le 11 septembre”. “Le journal, en (...) démontant les mécanismes qui ont permis la diffusion, a conclu le tribunal de Paris, pouvait librement écrire que la démarche de celle-ci n'était pas caractérisée par la rigueur scientifique et qu'il cédait aux facilités du support choisi (Internet).” Me Bernard Jouanneau, l'avocat de M. Meyssan, a annoncé son intention de faire appel. »


Arrêt de la cour d’appel de Versailles, 9 septembre 2004 :

« APPELANT

Monsieur Thierry Marie Didier MEYSSAN

né le 18 Mai 1957 à TALENCE (33)

demeurant 8 rue Auguste Blanqui - 93200 ST DENIS

représenté par la SCP TUSET-CHOUTEAU Avoués

assisté de Me Bernard JOUANNEAU, avocat au barreau de PARIS

[…]

Considérant d’autre part que l’article s’appuyant sur les déclarations de témoins visuels du drame, simples particuliers ou professionnels des médias, s’attache à réfuter point par point la thèse querellée, témoignages dont la fiabilité ne saurait être remise en cause par la contestation et la réfutation que l’appelant en fait ou en a fait dans son second ouvrage “Le Pentagate”, que l’article est en outre illustré d’une photographique montrant les débris d’une carlingue d’avion écrasée devant le bâtiment du Pentagone, qui renforce d’autant le sérieux du reportage et la volonté de rétablir la véracité des faits face à la thèse de Thierry MEYSSAN ;

Considérant que dans un tel contexte, le ton polémique et le choix des mots “imposture” et “imposteur”, réplique volontaire au mot d’imposture employé par l’appelant dans son ouvrage pour contester la véracité de l’écrasement d’un avion sur le bâtiment du pentagone causant des centaines de morts, ne dépassent pas le seuil de prudence et d’objectivité dont doit faire preuve tout journaliste ;

Considérant que les intimés sont dès lors fondés à invoquer le bénéfice de la bonne foi qui doit leur être reconnu ;

Considérant qu’il convient en conséquence de débouter Thierry MEYSSAN de ses demandes ;

Considérant qu’eu égard aux situations respectives des parties, aucun motif tiré de l’équité commande l’application des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre des parties ;

Considérant que l’appelant qui succombe dans ses prétentions, doit supporter la charge des entiers dépens ; »

ð  Pour ne pas être rébarbatif, seules deux des multiples relaxes de journaux poursuivis par le conspirationniste Thierry Meyssan sont citées ici.


Valérie Boyer, « Génocide arménien: "La négation d'un crime ne relève pas de la liberté d'expression" », Lexpress.fr, 23 avril 2015 :

« Doit-on en rester là ? Quelque chose ne colle pas. Avec les vingt-cinq années d'acquis et cent ans de déni, l'idée s'est imposée d'elle-même: la négation d'un crime ne relève pas de la liberté d'expression (Sévag Torossian, Vous n'existez pas. Négationnisme et mensonges d'Etat, L'Harmattan, 2013). L'évidence même: c'est le cadre qu'il fallait changer. Sortir l'infraction de la loi de 1881 sur la liberté de la presse et l'insérer dans le code pénal. C'est pourquoi, avec le précieux concours de Bernard Jouanneau, avocat et éminent spécialiste du négationnisme et l'expertise de Maître Sévag Torossian [alors avocat de l’ambassade d’Arménie à Paris], j'ai déposé une proposition de loi à l'Assemblée nationale en octobre 2014, visant à réprimer la négation des génocides et des crimes contre l'humanité du XXe siècle [proposition finalement rejetée par l’Assemblée nationale, sous forme d’un renvoi en commission, la forme courtoise de l’enterrement]. »

 

« Conspirationnisme : Thierry Meyssan, le maître à fausser », L’Express, 17 avril 2015 :

« En 2006, Thierry Meyssan effectue un premier voyage au Liban et en Syrie, peu après des attaques israéliennes contre les bases du Hezbollah. Il est l'invité de ce dernier et du régime de Damas. Deux ans plus tard, pour échapper à un invraisemblable "contrat" que Nicolas Sarkozy - "élu grâce à la CIA" - aurait mis sur sa tête, l'amateur de complots s'installe à Damas, dans le quartier des ambassades. Il devient un expert habilité auprès d'une cohorte de médias "antioccidentaux" ou "antisionistes": chaînes télé du Hezbollah et du régime iranien, RT (ex-Russia Today, pro-Kremlin), radios et quotidiens syriens... Le site Internet du Réseau Voltaire international revendique 760 000 visiteurs uniques par mois. Le véritable ordre de grandeur se situe plutôt autour de 20 000 à 30 000.

Cependant, il est traduit en 16 langues. Ce qui nécessite d'importants moyens financiers et humains. Lesquels ? Les indices affleurent. A Damas, Thierry Meyssan forme des cadres du régime au sein de l'institut de recherche politique Syria Al-Ghad (Syrie Demain). Le vice-président du Réseau, Issa el-Ayoubi, est un cadre du Parti social-nationaliste syrien, formation d'inspiration nazie créée dans les années 1930. "Thierry Meyssan a choisi de s'allier avec les pires antisémites tout en se gardant de manier lui-même cette rhétorique, poursuit Gilles Alfonsi. Voilà toute la malignité et la perversité de son discours." »

 

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