mercredi 2 septembre 2020

Janvier 1984 : la police de la République met au pas les énergumènes de Jean-Marc « Ara » Toranian



 

René Dzagoyan, « Portrait d’une manifestation », Armenia, février 1984, p. 17 :

« Ils étaient venus d’un peu partout : Valence, Lyon, Marseille… Par TGV. Les premiers qui arrivèrent se dirigèrent tout droit vers un restaurant. L’Odéon n’était qu’à une demi-heure. Et il y avait le temps d’un repas. Mais bizarrerie : à la sortie même de l’établissement, attendaient deux cars de CRS. L’un après l’autre, tous ceux qui étaient entrés dans le restaurant une heure plus tôt se retrouvaient dans le car des compagnies républicaines de sécurité. […]

En dépit de cette sélection “naturelle”, quelques manifestants, une centaine environ, arrivèrent à se regrouper place de l’Odéon. La préfecture de police avait annulé la manifestation au dernier moment. […]

Manifestation interdite, donc. Mais cela n’empêcha rien [sic]. Les plus jeunes ne perdirent aucune occasion de bloquer pour quelques secondes le boulevard Saint-Germain, le temps de déployer une banderole rouge où s’inscrivait le mot “Hayasdan” [« Arménie »]. Dès qu’elle était en berne, les CRS dévalai[en]t de nouveau de leur car, matraque au poing, jusqu’au point où, quelques secondes plus tôt, les “Arménuches” manifestaient avant de se fondre dans la foule. Ce manège dura de trois heures de l’après-midi jusqu’à sept heures et demie du soir. Un coup de banderole et un coup de charge de CRS. […] Mais, au-delà de l’amusement, certains firent une réflexion, qu’ils partagèrent d’ailleurs : si les Arméniens n’ont pas le droit de réduire le nombre des ambassadeurs [sic : allusion aux assassinats de diplomates turcs, par exemple l’ambassadeur à Paris, en 1975, par les terroristes arméniens des CJGA/ARA et de l’ASALA], s’ils n’ont pas droit de prendre des otages, et s’ils n’ont pas le droit de manifester pacifiquement ; qu’ont-ils le droit de faire ? »

 

Quelques explications sur ce texte délibérément obscur. La manifestation, illégale, eut lieu à l’appel du Mouvement national arménien (appelé Mouvement national arménien pour l’ASALA de 1982 à 1983) de Jean-Marc « Ara » Toranian, et devait avoir lieu devant le palais de justice de Paris (quelques énergumènes tentèrent de s’en approcher et furent arrêtés, comme les autres, évoqués ci-dessus). C’était le jour où se tenait le procès d’une prise d’otage mortelle au consulat général de Turquie à Paris, devant la cour d’assises. Les prévenus étaient défendus (notamment) par Patrick Devedjian et Henri Leclerc.

Les intentions des manifestants se devinent quand on connaît deux déclarations. D’abord, celle de Franck « Mourad » Papazian (devenu depuis coprésident du Conseil de coordination des associations arméniennes de France) dans Haïastan de février 1982, à propos du procès de Max Hraïr Kilndjian (CJGA) devant la cour d’assises d’Aix-en-Provence :

« Cette foule qui, pendant deux heures, a crié, a chanté, cette foule qui, pendant deux jours a soutenu Hraïr, cette foule consciente, concernée, passionnée, cette foule qui a su quand il fallait crier [sic], chanter ou garder le silence, a sûrement influencé la décision du jury. […]

Non Hraïr ne devait plus rester en prison. C’en était assez, c’était même trop. Et puis cette foule, non pas excitée, mais convaincue, quelle allait être sa réaction [en cas de condamnation supérieure au temps passé en détention provisoire] ? Mieux vaut ne pas y penser. »

Une manière brutale et cynique de dire que le verdict a été obtenu par la menace de lynchage.

L’autre déclaration à connaître est celle de Jean-Marc « Ara » Toranian lui-même, au Figaro du 2 février 1984, à propos cette fois-ci du procès de Paris, qui eut lieu en même temps que la manifestation illicite de son mouvement : « Nous avons été trahis, c’est tout le peuple arménien qui a été condamné à sept ans de prison. » Je passe sur la mégalomanie, au sens clinique du terme, que révèle cette phrase. L’essentiel, en l’occurrence, est que M. Toranian ait publiquement avoué que son but était de rééditer la performance d’Aix en 1982, consistant, non seulement à obtenir une peine bien plus clémente que la moyenne, mais aussi à faire juger, pour la réduire encore, que le charbon est blanc — en l’espèce, que ce n’était pas une affaire de meurtre mais d’homicide involontaire (une absurdité que la cour d’assises a refusé d’avaliser, sa sécurité physique n’étant pas directement menacée), et à Aix-en-Provence, que Max Hraïr Kilndjian n’était que complice (une contrevérité extorquée sous la menace).

Enfin, il n’est pas inutile de savoir que c’est le même René Dzagoyan qui a écrit l’article signé ci-dessus et qui avait, l’année précédente, refusé de réprouver l’attentat d’Orly (perpétré, comme la prise d’otages sanglante de Paris, par l’ASALA), s’employant au contraire à le justifier de manière insidieuse.

 

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