mardi 19 décembre 2023

La gauche française et la question turco-arménienne dans les années 1920



Fanny Clar (socialiste et féministe), « L’escroquerie à la pitié », Le Populaire (organe de la SFIO, ancêtre du Parti socialiste), 3 mars 1920, p. 2 :

« Il y a longtemps déjà que, pour la première fois, nous avons entendu un appel à la pitié en faveur de l’Arménie. Ces jours-ci encore, la Ligue des Droits de l’Homme nous adressait une protestation contre le massacre des Arméniens par les Turcs.

J’allais m’émouvoir, lorsqu'on m’apporta un document qui me fit réfléchir. Paraphées d’une signature dont personne ne contestera l’autorité, dont nul ne mettra en doute l’impartialité, je lis les lignes suivantes :

“Oh ces Arméniens, dont j'ai tant de fois constaté les propagandes effrénées, ils viennent de faire, en l’espèce, un véritable coup de maître !

Nous allons donc bientôt voir en France ce film sensationnel, qui a déjà fait le tour des États-Unis. Les journaux qui, en termes dithyrambiques, l'annoncent comme un tour de force d'une habileté insurpassable (sic) n'hésitent pas d'ailleurs à nous confier qu'il est faux de toutes pièces et qu'il a été composé en Amérique, d'après les récits de quelques Arméniens, mais à l'aide de figurants quelconques, camouflés, grimés et peinturlurés; ils croient pouvoir ajouter toutefois ajouter toutefois, — contradiction et naïveté stupéfiantes, — que rien n'est plus convaincant ni plus poignant, et que le martyre de l'Arménie y est représenté avec la plus émouvante vérité !”

Ah ! non, non ! La vérité, nous apprit-on, vint nue au monde. Sous cet affublement, parée pour le film, je ne la reconnais plus. Elle ne pourrait en appeler à la pitié.

Pierre Loti, qui signa les lignes dessus, dans l'Écho de l'Islam, ajoute que l’entreprise est ingénieuse, hardie et qu’elle pourra devenir très lucrative, ce qui ne saurait déplaire aux Arméniens. Je le crois volontiers, mais s'il est des âmes simples qui croiront que “c’est arrivé”, j’estime que cette escroquerie à la pitié manque de dignité autant que de loyauté.

Quant aux Turcs, plus discrets et plus loyaux, ils se sont bornés à photographier dus charniers de cadavres des leurs préparés par les Arméniens, mais au moins c’est d’après nature.

L’écrivain ajoute qu’il a communiqué à L’Illustration “quelques lugubres images de ces charniers-là, qui, pour comble d'horreur, ne se composaient guère que de femmes, d'enfants, et de vieillards, les Arméniens ayant opéré surtout pendant la dernière invasion russe, dans des villages turcs d'où toute la population masculine venait d'être levée pour la guerre.” »

 

Édouard Daladier (député radical-socialiste et futur président du Conseil), « À San Remo », Le Rappel, 21 avril 1920, p. 1 :

« D’autre part, il [le Royaume-Uni de David Lloyd George] a mis la main sur la Perse, la Mésopotamie, le Kurdistan et la Palestine, découvert ou inventé l’émir Feyçal. Pour joindre l’empire anglais d’Afrique à celui des Indes par une chaîne ininterrompue de protectorats et de pays annexés, il reste à constituer une grande Arménie et à détruire le mouvement nationaliste turc dont l’Anatolie est le foyer. […]

Refusons de nous associer à la curée de la Turquie et demeurons fidèles à la doctrine républicaine et française de la liberté des peuples. »

 

Journal officiel de la République française, 26 juin 1920, p. 2430 :

« M. [Édouard] Daladier. Je parlerai tout à l’heure de la question des Arméniens. Je constate, en passant, que nul ne parle plus [en France] de la grande Arménie, dans la presse ou le Parlement. »

 

« Les musulmans persécutés en Arménie », Le Radical (journal soutenant, comme son nom l’indique, le Parti radical-socialiste), 25 juillet 1920, p. 3 :

« Batoum, 24 juillet.

La situation des Musulmans en Arménie est devenue critique. Les persécutions en masse auxquelles se livrent le gouvernement d’Erivan et le Parti “dachnak” contre ces Musulmans, les massacres et les violences qui se sont renouvelés ces deux mois derniers poussent les débris des populations musulmanes à s’enfuir en Perse en abandonnant leurs foyers et leurs biens. Le gouvernement arménien a organisé une commission spéciale pour enregistrer les moissons abandonnées par les Musulmans et les Grecs dans le district de Kars. Dans le district de Zanguibazar, vers la fin de juin, une vingtaine de villages musulmans furent détruits à coups de canon et leurs habitants massacrés. À l’heure actuelle, la population musulmane de Transcaucasie se trouve prise entre Arméniens et bolchevistes. Le nombre des victimes dépasserait plusieurs dizaines de mille, en dehors des réfugiés. »

 

Bernard Guinaudeau, « Le problème oriental », Le Radical, 22 novembre 1920, p. 1 :

« De même en Cilicie. Il est entendu que, là, nous devons évacuer bientôt. En attendant, force nous est de reconnaitre que, si nous avons subi les échecs et les pertes si nous militaires que nous avons subis, c’est notre faute. Si les kémalistes nous ont attaqués en Cilicie, c'est à la suite du débarquement des Grecs à Smyrne, débarquement opéré d'accord avec nous. Et si les Turcs sont exaspérés contre les Arméniens, dont on redoute le massacre au cas où nous nous retirerions trop tôt, nous ne pouvons nous en prendre nous qu'à nous-mêmes. C'est nous qui avons fait venir et groupé en Cilicie les Arméniens de Syrie, de Palestine, d’Anatolie, d’Amérique même, qui les avons armés, qui les avons alignés contre les Turcs, sous des uniformes français. »

 

Paul Louis, « La Cilicie sera évacuée… Mais quand donc évacuera-t-on la Syrie ? », L’Humanité, 12 mars 1921, p. 3 :

« Le traité de Sèvres, dont la caducité apparaissait dès le premier jour à tous les yeux, est définitivement anéanti. Voilà un fameux coup de pioche dans l'édifice des paix de vengeance et de rapine. »

 

André Pierre, « Une victoire kémaliste — L’accord franco-turc », Le Populaire, 13 mars 1921, p. 1 :

« Bekir Sami Bey a bien travaillé pour son pays à [la conférence de] Londres. Il s’est imposé aux Alliés comme le seul représentant de la Turquie. Il a brisé la superbe britannique qui ne voulait pas reconnaître le Kémalisme. Il a imposé hier, à la France, la signature de l'accord par lequel notre gouvernement s'engage à cesser les hostilités en Cilicie dans un délai de sept jours et à évacuer le pays dans le mois [plus exactement, un accord de ce type était recherché par le gouvernement français depuis 1919, et plus particulièrement depuis le retour au pouvoir d’Aristide Briand, en janvier 1921 ; rejeté par le Parlement d’Ankara à cause, notamment, de ses clauses économiques et de la présence d’officiers français dans l’encadrement de la gendarmerie turque, il est finalement signé puis ratifié, sous une forme modifiée, en octobre de la même année. Dans sa version de mars comme d’octobre, l’accord franco-turc est violemment combattu par les nationalistes arméniens.].

Par son action à Londres, le géant d'Anatolie a prouvé que la force seule en impose aux vainqueurs. Était-ce au nom du droit et de la justice que les Alliés avaient imposé la signature du traité de Sèvres au sultan de Constantinople ? Non. Ils avaient cru pouvoir donner libre cours à leurs appétits et dépecer à leur gré l'Empire ottoman, parce qu'ils pensaient que l’”Homme malade” était à l'agonie et se laisserait dépouiller. Ils avaient compté sans la résistance d'Angora, sans la force militaire des nationalistes. »

 

Claude Marsey, « Pour la Turquie », Floréal (hebdomadaire socialiste), 23 avril 1921, p. 401 :

« Un article récent paru dans la presse parisienne vient de nous décrire l'aspect nouveau de Constantinople depuis que la malheureuse Turquie, épuisée par la guerre, n'est plus qu'une belle captive âprement disputée par les ambitions occidentales.

Stamboul n'est plus le merveilleux Stamboul que Pierre Loti nous avait appris à aimer, comme un mirage attirant et lointain. La vie turque en a disparu. L'ordre, ou ce qu'on veut bien nommer ainsi, est maintenu par des policemen anglais. Les rues sont encombrées de matelots yankees, de tirailleurs sénégalais, de cosaques et de carabiniers italiens. Ce pays de l'honnêteté est infesté de pickpockets arméniens. Dans les bouges où fréquente la racaille du monde, on se bat à coups de revolver. Les vrais Turcs se sont réfugiés dans l'intérieur de l'Asie. Les mystérieux harems les ont suivis. Il n'en reste plus qu'un —et c'est un Français converti à l'Islam, Durdeau bey, qui le tient!

Quelle étrange destinée que celle de ce peuple! Nul ne l'a dépassé en puissance, lorsqu'au XVIIe siècle il s'étendait sur trois continents et balançait l'empire espagnol. Nul n'est tombé aujourd'hui aussi bas. On l'a accablé d'outrages. Il a trouvé, chez ses ennemis mêmes, les plus ardents défenseurs. Dans de telles conditions, à qui croire? Comment se faire une opinion sur lui?

Pour ceux qui n'ont, comme moi, jamais mis les pieds sur les rives du Bosphore, la solution pourtant me semble aisée. Il suffit de réfléchir à ceci : ont dit du mal des Turcs ceux qui n'en ont jamais approché.

Au contraire, qui a vécu de la vie orientale, là-bas, avec les vrais Osmanlis, c'est-à-dire avec le peuple, en a rapporté un enthousiasme que rien ne peut amoindrir.

Ces témoins-là, il me semble équitable d'y ajouter foi. Le plus important de tous, je l'ai déjà cité, est Loti. Mais tout le monde connaît Azyadé, Fantôme d'Orient, Les Désenchantées et aussi ses livres de propagande, le dernier de tous, le plus beau des plaidoyers : La Mort de notre chère France en Orient.

C'est à des souvenirs pour moi plus directs que je veux faire appel aujourd'hui. Un de mes amis a parcouru en tous sens l'empire ottoman à l'époque où régnait encore Abdul-Hamid De retour à Paris, il ne tarissait pas d'éloges sur le peuple qu'il avait appris sur place à aimer.

— Nul n'est plus attachant, disait-il. Loyal : vous pouvez croire en sa parole. Honnête: vous pouvez laisser votre argent sur une table, quelle qu'elle soit, et serez sûr de le retrouver le lendemain. Sobre: il vit de peu et boit de l'eau claire. Philosophe: il bâtit ses maisons en bois, car il sait que rien n'est éternel. »

 

Léon Blum, « Les interpellations à la Chambre — Le discours de M. Briand », Le Populaire, 22 octobre 1921, p. 1 :

« Au milieu de ce développement [d’Aristide Briand sur l’Allemagne], un effet de surprise, un petit coup de théâtre, unanimement applaudi : les préliminaires de paix avec la Turquie, votés par l’Assemblée d’Angora [Ankara]. »

 

Paul Allain, « En passant — Le poète a raison », Le Radical, 21 octobre 1921, p. 1 :

« Oui, je sais bien qu’on ne fait pas de la politique avec du sentiment. Mais, peut-être, le sentiment, quand il est fondé en raison, — ce qui peut arriver, n'est-ce pas ? —est-il un guide que, même en politique, il serait imprudent de dédaigner.

Et il semble bien que nous en ayons sous les yeux une éclatante démonstration.

De quelles railleries n’a-t-on pas criblé Pierre Loti, à cause de ce que l’on appelait sa faiblesse, sa partialité, son inexcusable tendresse pour les Turcs ! Raisons de poète, disait-on quand il plaidait leur cause, mauvaises raisons.

Eh bien ! elles étaient bonnes, et les faits prouvent qu'il eût été sage de ménager les Turcs.

Il est vrai que les faits auraient pu, dans une certaine mesure, se tourner contre eux et contre Pierre Loti ; car la force, nous ne le savons que trop, n’est pas toujours du côté de la justice.

On a essayé de les réduire ; on a cru qu’ils l’étaient. On a voulu leur imposer le traité de Sèvres, aussi absurde qu'injuste.

Les Turcs ont refusé de l'accepter et ils ont continué de se battre pour l’annuler. Ils l’emportent. Annulera-t-on le traité de Sèvres ?

Dans sa tranquille maison de Rochefort, où il a accumulé tant de belles choses qui perpétuent sous ses yeux le vivant spectacle de tous sous les pays yeux où il passa, vécut, aima, avec quelle angoisse Pierre Loti a dû suivre les péripéties du grand drame autour qui vient, on peut l’espérer, de s’achever autour d'Eski-Cheir et de Smyrne [l’offensive grecque de l’été 1921, arrêtée en septembre de la même année] Avec quelle joie il en apprendra le dénouement !

Dans le dernier livre qu'il vient de publier, le dernier qu'il publiera, Suprêmes visions d'Orient, il a écrit : “Le suprême avertissement d'un homme qui va entrer demain dans la grande nuit a toujours chances d'être entendu.” Et il adresse aux Anglais une ardente prière. Il les adjure de ne pas s'acharner contre les Turcs, “de ne pas contribuer à exterminer cette race loyale, courageuse et douce, en fournissant à leurs odieux petits adversaires, si comiquement infatués, tous les moyens modernes de destruction”. Les Anglais ne l'ont pas écouté hier ; il faut souhaiter qu'ils l'écoutent aujourd'hui et avisent à faire la paix.

Sans doute, Pierre Loti, en poète toujours, caractérise les Grecs et les Turcs en des termes dont les diplomates pourront prendre et laisse. Il est entendu que le sentiment n'est pas tout en cette affaire.

Mais, sentiment à part, Pierre Loti a vu juste et, comme toujours, il a le mot propre. De cela, les diplomates auront avantage à tenir compte.

Même politiquement, le poète a raison. »

 

Léon Guerdan (dirigeant du parti nationaliste arménien Ramkavar), Je les ai tous connus, New York, Bretano’s, 1942, p. 17 :

« Et tandis que, dans sa modeste chambre, il [Édouard Herriot] se faisait la barbe […], j’exposai du mieux que je pus le problème arménien [la rencontre n’est pas datée par Guerdan avec exactitude, mais il précise qu’elle a eu lieu après la signature l’accord d’Ankara, donc après le 20 octobre 1921].

— De solides liens d’amitié m’attachent aux Turcs, dit-il. Mes amis de Constantinople m’accueillirent au lendemain de leur révolution de 1908 avec un enthousiasme dont le souvenir ne s’effacera jamais de mon esprit. Il m’est impossible d’agir contre eux, et cela, malgré tout le désir que j’aurais de vous plaire.

Puis, il se lança dans une tirade ; il exposa la nécessité pour la France de rétablir une alliance scellée par François Ier  et Soliman le Magnifique, il célébra les Capitulations et les énormes services que la Turquie nous avait rendus au cours des siècles ; il chanta avec un lyrisme à la Loti la générosité d’un peuple débonnaire, loyal, et alla jusqu’à excuser son intervention aux côtés de l’Allemagne en 1914, l’attribuant au besoin impérieux de se défendre contre la Russie tzariste, notre alliée, dont nous favorisions les ambitions à ses dépens. »

 

[Victor Snell], « Coin des lettres et des arts », La Lanterne, 21 janvier 1922, p. 3 :

« L'auteur est sans conteste —ou alors les contestants ont tort — le meilleur conteur d'aujourd'hui. Nul mieux que lui ne sait tirer d'une donnée narrative le “dramatique” qu'elle peut renfermer, de le lui adjoindre si elle ne le contient pas naturellement. Cette aventure (voici le titre exact) : d'Achmet Pacha Djedaleddine, pirate, amiral, grand d'Espagne et marquis, est extraordinaire, en effet, et on y prendra un plaisir extrême — le même qu'aux “six autres singulières histoires” qui l'accompagnent. Dirai-je que la sympathie que je me sens pour ce livre charmant lui était gagnée d'avance par une vigoureuse préface sur “les Turcs”. Claude Farrère y lave ce peuple noble et loyal de toutes les sottises qu'on a colportées contre lui à l'occasion de la guerre dans laquelle il est entré de force. (Flammarion, éd.). »

 

« La ville de Smyrne a bien été incendiée par les Arméniens et par les Grecs », Le Rappel (quotidien de tendance radicale-socialiste), 23 septembre 1922, p. 1 :

« Les Grecs ont tenté d'accréditer la version que ville de Smyrne avait été incendiée par les Turcs. Il  s'est trouvé des journaux français [essentiellement le Journal des débats, sous la plume du turcophobe antisémite Auguste Gauvain] pour accepter de propager cette nouvelle, aussi fausse qu’invraisemblable.

L’envoyé spécial du Matin, qui vient de faire son enquête dans la ville sinistrée, remet les choses au point. Nous lui cédons bien volontiers la parole :

“Smyrne, 19 septembre. L'incendie qui s'était déclaré à Smyrne le mercredi 13 septembre, à 11 heures, était maîtrisé dès le jeudi 14. Il fut activé par un vent du sud-ouest, qui rabattait les flammes vers la mer. Les maisons ont été détruites sur une superficie de 280 hectares. Les deux tiers de la ville ont été anéantis. Poussée sur le front de mer, la population fut prise de panique. Un grand nombre de personnes tombèrent dans l’eau ou s’y jetèrent par frayeur. Hier encore de très nombreux cadavres flottaient dans le port.

Je me suis promené longuement parmi les décombres, qui recèlent aussi des cadavres. La puanteur est affreuse.

Mon enquête personnelle confirme absolument que l'incendie fut allumé par les Arméniens dans leur quartier avant de l'abandonner. Le pillage qui s'ensuivit fut l'œuvre des Kurdes qui suivent l'armée turque et de la racaille de Smyme, sans distinction de nationalité ni de race.

Mustapha Kemal pacha semble avoir gardé un parfait contrôle sur les troupes régulières, sur lesquelles les Arméniens, tous armés et surexcités par leurs prêtres, ont tiré et jeté des grenades.

Les Français ont été respectés et écoutés par les Turcs. Pendant l'incendie, nos marins ont eu toutes facilités pour procéder au sauvetage des réfugiés aussi travaillent-ils sans relâche et avec un dévouement admirable à transporter des réfugiés à bord du Jean-Bart, de l'Edgar-Quinet et des autres navires de guerre.

Le transport Tourville embarque aujourd'hui 1.200 réfugiés. Le Pierre-Loti emmène à Constantinople 300 malades, tous Arméniens ou Grecs provenant de camps de concentration [le terme n’a évidemment pas, en 1922, la connotation sinistre que lui ont donné les systèmes concentrationnaires nazis et communistes ; le Goulag est encore peu connu, en Europe occidentale] visités par la Croix-Rouge américaine.

Le général Pellé est venu conférer avec l'amiral Dumesnil et les autorités kémalistes au sujet de l’évacuation des réfugiés.” »

 

A. Delhay, « La paix de Lausanne a été signée hier », L’Humanité, 25 juillet 1923, p. 3 :

« Le traité de Lausanne comporte pourtant un grand avantage : il consacre l'existence de la Turquie libre. Les impérialismes alliés ont dû reconnaître au gouvernement d'Angora une souveraineté égale à celle de tous les États modernes. »

 

Albert Milhaud (député radical-socialiste, rapporteur pour la ratification du traité de Lausanne en 1924, futur secrétaire général du parti), « La République turque », France & Monde, 1er septembre 1924, p. 287 :

« La Turquie est devenue à la fois une République et un Etat laïque. Contre l'éviction de la Turquie hors de l'Europe et contre l'établissement des Grecs à Smyrne et en Anatolie, Moustapha Kemal a pris son parti et a triomphé.

Son second, Ismet Pacha, est le véritable vainqueur de la bataille diplomatique qui s'est livrée à Lausanne ; il est considéré comme le libérateur du territoire. Grâce à lui, la Turquie a fait reconnaître sa domination sur Constantinople, Andrinople et Karagatch, c'est-à-dire sur la Thrace Orientale ; elle conserve le contact qu'elle veut garder avec la civilisation occidentale. Elle évite le morcellement de l'Anatolie en écartant le danger d'un établissement de la Grèce d'Europe dans la Turquie d'Asie, en supprimant le projet d'une République arménienne indépendante.

Les Turcs, après leur défaite, s'étaient laissé dicter une paix qui les chassait de la Thrace, de la province de Smyrne, de l'Arménie [au sens d’Anatolie orientale], sans parler des pays de mandat [Syrie, Liban, Irak, etc.]. D'où la protestation violente des Congrès d'Anatolie.

Le général diplomate Ismet Pacha a obligé l'Angleterre à abandonner de grands rêves : un empire grec sous protectorat anglais dans la mer Egée, une influence anglo-saxonne en Arménie, portant sur les voies de la Mer Noire, le Caucase, etc.

Il est indispensable que le Parlement français répare les fautes commises et que nos ministres de l'Instruction publique et des Affaires étrangères reprennent, d'accord avec la République turque, l'œuvre de diffusion de la langue française, en dehors de tout prosélytisme religieux. Il ne faut pas s'attarder dans le regret des Capitulations ; il importe de sauvegarder l'influence intellectuelle et spirituelle de la France en Orient. En la sauvegardant, ils ne desserviront pas les vœux de la Turquie nouvelle. Alors que les congrégations catholiques ont pu vivre en bonne intelligence avec le Commandeur des Croyants, il serait décevant que le régime républicain des deux pays ne trouvât pas une formule d'accord. »

 

Henri Barbusse (compagnon de route du Parti communiste), Voici ce qu’on a fait de la Géorgie, Paris, Flammarion, 1929, pp. 39-40 :

« Oui, dit Akopian. Cette affaire cosmique, provenant de causes qui nous échappent jusqu'à nouvel ordre, prouve la tyrannie de la nature, et que l'Arménie n'a pas de chance. Mais sous ces détritus du tremblement de terre, il y a d'autres plaies, plus grandes, plus profondes, faites par les hommes, et qu'il faut regarder.

[…] La révolution de février se présenta à nous sous la figure des dachnaks. Le parti Dachnaktzoutioun [Fédération révolutionnaire arménienne, au pouvoir dans l’Arménie indépendante de 1918 à 1920-1921], c'est le parti révolutionnaire arménien. Du moins le mot révolutionnaire se trouve dans son titre, mais nonobstant cette pancarte (dans jésuite, il y a bien : Jésus), son but est avant tout et par-dessus tout, de provoquer le Turc et de se battre contre lui — pour créer après, quand il ne restera plus personne, un paradis terrestre exclusivement arménien ! »

 

Lire aussi, sur la France :

Turcs, Arméniens : les violences et souffrances de guerre vues par des Français

Le soutien public d’Henri Rollin (officier de renseignement) aux conclusions de Pierre Loti

La turcophilie de Pierre Loti vue par l’antifasciste Victor Snell

L’arménophile Jean Longuet et les Turcs

L’évolution d’Émile Wetterlé sur la question arménienne et les Turcs

La vision communiste du conflit turco-arménien (avant le tournant turcophobe imposé par Staline)

Maurice Barrès : de l’antisémite arménophile au philosémite turcophile

La France briando-poincariste contre l’axe FRA-Hoyboun (alliance de nationalistes arméniens et kurdes)

La crise arménienne de 1895 vue par la presse française

L’arménophile Francis de Pressensé sur l’impossibilité démographique du séparatisme arménien en Anatolie (1895)

 

Sur la question de Cilicie :

La conduite exécrable des légionnaires arméniens en 1918-1919

Février-mars 1920 : une campagne francophobe et turcophobe des organisations nationalistes arméniennes

23 avril 1920 : la justice française condamne l’ex-archevêque Moucheg Séropian pour terrorisme

1920-1921 : l’irréductible conflit des points de vue français et nationaliste arménien sur Çukurova (« la Cilicie »)

 

Sur les massacres de la Première Guerre mondiale en Anatolie :

Les massacres de musulmans et de juifs anatoliens par les nationalistes arméniens (1914-1918)

Le « négationnisme » d’Yves Ternon et Pierre Tévanian

1917-1918 : la troisième vague de massacres de musulmans anatoliens par les nationalistes arméniens

Nationalisme arménien et nationalisme assyrien : insurrections et massacres de civils musulmans

 

Sur les massacres dans le Caucase :

Les massacres d’Azéris par les dachnaks et les divisions entre Arméniens à ce sujet (1918-1920)

L’exaspération de Lord Curzon face à la politique de purification ethnique mise en œuvre par l’Arménie (1920)

Les massacres de Juifs par les dachnaks en Azerbaïdjan (1918-1919)

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