« Les Républiques
du Caucase — L’insurrection en Azerbaïdjan », Le Temps, 28 avril 1921, p. 2 :
« On nous écrit de Constantinople :
D'après le récit d'un réfugié qui avait quitté Bakou vers la fin du mois de
mars, les soulèvements de la population de l'Azerbeïdjjan contre les bolchevistes
russes continuent presque sans relâche.
La situation dans la province de Lenkoran [Lankaran], où règne l'insurrection, n'a pas changé beaucoup en faveurdes bolchevistes, qui
n'occupent que la ville seule [depuis
décembre 1920], et encore, grâce à la flotte de la Caspienne. Les
alentours, ainsi que la majeure partie de la province, se trouvent entre les
mains des insurgés qui repoussent les demandes d'armistice. Les Soviets de
Bakou ont envoyé d'urgence à Lenkonan le commissaire “le plus à la mode”,
Husseinof (étudiant imberbe) pour qu'il tente de se faire entendre par la
population, mais il n'a pas pu se servir de son éloquence, la population de la
ville, étant mal disposée envers les bolchevistes. Après avoir attendu en vain
trois jours sans pouvoir se faire entendre, l'envoyé de Bakou fut obligé de se rembarquer
devant l'attitude menaçants des habitants.
Dans le Karabagh, le
mouvement insurrectionnel commence à prendre un nouveau caractère. Jusqu'ici,
les bolchevistes appliquaient dans cette région à la population mélangée leur
politique traditionnelle “Diviser pour régner.” C'est elle qui leur a permis de
réprimer les grands soulèvements de Gandjà et d'Agdan [Agdam], grâce au concours de la population arménienne. Après
l'installation des bolchevistes en Arménie, et depuis que les Arméniens ont
connu par eux-mêmes ce régime, leur attitude s'est modifiée. Les régions
montagneuses du Karabagh, et surtout du Zanghezour, sont devenues l'asile des
réfugiés arméniens poursuivis par les bolchevistes d'Erivan. Ainsi est née la solidarité
entre les deux populations qui veulent s'entendre dans la lutte contre l'ennemi
commun.
Au moment où la personne qui nous donne ces détails s'apprêtait à quitter
Bakou, on venait d'y recevoir la nouvelle de l'entrée à Choucha (capitale du
Karabagh) des détachements tartaro-kurdo-arméniens de Sultan bey Sultanof, le
frère de l'ancien gouverneur général du Karabagh, emprisonné traîtreusement par
les bolchevistes. On l'avait fait venir à Bakou par ruse, en lui promettant un
accueil somptueux, et une fois qu'il fut entré en ville, il fut jeté en prison.
Les Kurdes sont l'élément le plus guerrier de l'Azerbeïdjan, et, une fois
engagés dans la lutte, ils la font avec fermeté et persévérance. Vu ce
caractère nouveau de l'insurrection du Karabagh, ainsi que la situation stratégique
de la région montagneuse et la difficulté des communications, les
préoccupations des maîtres de Bakou doivent être sérieuses, et l'œuvre de “pacification”
de l'Azerbeïdjan sera une tâche assez difficile pour les “pacifistes” de Moscou. »
Audrey Altstadt, The Azerbaijani
Turks, Stanford (Californie), Hoover Institution Press, 1992, p. 111 :
« La bataille de Gandja [mai-juin 1920] fut le début, et non la fin, de la
résistance armée à la conquête de l’Azerbaïdjan par les bolcheviques. Après l’écrasement
de Gandja, des soulèvements se sont produits au Karabakh et au Zakatala. […]
Des batailles similaires eurent lieu dans chaque grande ville d’Azerbaïdjan — à
Choucha et dans les autres villes du Karabakh, à Nuka, à Barda, dans les régions
du Zanguézour et du Nahçivan. […]
La résistance armée au pouvoir communiste était récurrente a continué jusqu’en
1924 au moins. »
Lire aussi :
Les
massacres d’Azéris par les dachnaks et les divisions entre Arméniens à ce sujet
(1918-1920)
La
popularité du stalinisme dans la diaspora arménienne
L’alliance
soviéto-nazie (1939-1941) et les projets staliniens contre la Turquie
L’arménophilie
stalinienne de Léon Moussinac
L’Union
générale arménienne de bienfaisance et le scandale des piastres
Et sur les aspects contemporains :
Le
consensus poutiniste chez les nationalistes arméniens
Jean-Marc
« Ara » Toranian relaie la désinformation russe contre l’Ukraine et la Turquie
L’hostilité
intangible des nationalistes arméniens à l’égard de l’Ukraine
L’aide turco-azerbaïdjanaise à l’Ukraine contre l’invasion russe
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