dimanche 29 novembre 2020

Quand Jean-Marc « Ara » Toranian reprochait à la FRA de ne pas être assez terroriste (1981)


 Prise d’otages au consulat turc de Paris, par l’ASALA (24 septembre 1981)


Jean-Marc Théolleyre, « Le militant arménien détenu est confronté au diplomate turc blessé à Rome — Le mouvement Libération arménienne a réuni mille cinq cents personnes à Paris », Le Monde, 21 novembre 1981 :

« Quatre heures de chants, de discours, de messages, une salle ardente acclamant sans fin les uns et les autres. Le mouvement Libération arménienne [branche « politique » de l’Armée secrète pour la libération de l’Arménie (ASALA), rebaptisée Mouvement national arménien pour l’ASALA en 1982], et son “Comité de soutien aux prisonniers politiques arméniens”, qui voulait, dans la mouvance de l'affaire Dimitriu Giorgiu [pseudonyme de l’assassin d’enfant Monte Melkonian], attirer l'attention, peut considérer que sa mission est à peu près accomplie après la réunion qu'il a organisée, jeudi soir 19 novembre, à la Mutualité et qui a rassemblé environ mille cinq cents personnes. Cependant, il s'agissait de faire de cette manifestation “le reflet d'une prise de conscience politique et collective de tous les Arméniens”. La fin de la soirée en altéra quelque peu l'unité lorsque M. Ara Toranian, au nom de Libération arménienne, accusa le parti Daschnak, émanation de la Fédération révolutionnaire arménienne [sic : « parti dachnak » est simplement le surnom de la Fédération révolutionnaire arménienne], de “trahison”, lui reprochant d'avoir, “par sa condamnation des actions terroristes, participé à une véritable intoxication”. Une partie de l'assistance en fut ouvertement choquée, le fit savoir, et l'on faillit même en venir aux mains. Beaucoup en cet instant ont considéré qu'une “erreur” avait été commise.

Car jusque-là, tout concourait à ce que le meeting puisse apparaître comme celui de toute une communauté.

Générations et conditions sociales confondues, on avait, en effet, applaudi le message de Me Henri Leclerc, l'un des avocats chargés de la défense des quatre [terroristes ayant réalisé la prise d’otages au] consulat de Turquie, à Paris, le 24 septembre [1981], qui demandaient que “le gouvernement français reconnaisse le génocide du peuple arménien” car “on ne saurait, devant une pareille nécessité morale, se dérober au prétexte d'un éventuel conflit diplomatique avec l'État turc, bastion avancé du militarisme occidental le plus chauvin et le plus agressif”. »

 

Commentaires :

1) La « condamnation » dont parlait M. Toranian était largement (sinon entièrement) imaginaire. Sans même s’attarder sur les torrents d’articles publiés par sa presse aux États-Unis, en faveur du terrorisme, la FRA, en France, soutenait son terroriste Max Hraïr Kilndjian depuis son arrestation pour tentative d’assassinat, en janvier 1980, et plus généralement le terrorisme.

Par exemple, dans son édition de juillet 1981, pp. 5 et 22, Haïastan (alors seul organe de la FRA en français, France-Arménie n’ayant été créé qu’en 1982) avait publié un article de fond intitulé « La lutte armée, une nécessité inévitable », où se trouvaient des phrases telles que « Le “terrorisme” s’affirme de plus en plus aujourd’hui comme un moyen d’expression désespéré pour les minorités politiques nationales, dans un monde qui se dégrade économiquement et socialement avec indifférence, basé sur le profit » ou : « Désespérée par cette situation arbitrairement bloquée, dégoûtée par une atmosphère politique hypocrite, fatiguée de se heurter au mur du silence, la jeunesse arménienne, réveillée enfin, décide dorénavant de mener des actions plus radicales, ayant recours à la violence. » Pas un mot de critique, en deux pages, contre l’ASALA, qui, à ce moment-là, avait déjà frappé le palais de justice de Genève, le 4 novembre 1980.

La seule « condamnation » qui a peut-être eu lieu, à l’automne 1981 (mais dont je n’ai trouvé aucune trace), concernerait l’attentat contre la gare de l’Est et des attentats antifrançais à Beyrouth, perpétrés par l’ASALA pour réclamer la libération de l’assassin d’enfant Melkonian ;

2) Ce n’est pas étonnant de lire qu’Henri Leclerc a utilisé le vocabulaire de la turcophobie stalinienne la plus éculée, qui plus est dans un contexte où l’importance de la Turquie tenait d’abord à son rôle contre l’URSS, cette même URSS qui venait d’envahir l’Afghanistan, y commettant un cortège de crimes. Le même personnage avait milité au Parti communiste « français » de 1953 à 1955 (donc à un moment paroxystique du sectarisme stalinien) et déclarait encore, en 2013 : « Je ne regrette pas mon engagement. »

 

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samedi 28 novembre 2020

La haine des Turcs depuis le biberon : le cas Vincent Nioré


Arthur Cerf, « Pouvoir : Qui est vraiment Vincent Nioré, surnommé “l’avocat des avocats” ? », Vanity Fair, 25 novembre 2020 :

« Vincent Arménak Nioré a grandi rue de la Défense – ça ne s’invente pas – à Issy-les-Moulineaux, dans les Hauts-de-Seine. Sa mère, ouvrière dans la confection, passe ses journées prostrée sur une machine à coudre, et “gueule” dans les files d’attente de la Sécu, car il manque toujours un papier. Le père, orphelin dès l’âge de 12 ans, est un homme rêche, qui se lève à 5h pour travailler sur des chantiers. Le soir, il envoie Vincent lui chercher un litron de rosé, du Baptistin Caracous, quand il n’a pas la main trop lourde. Le week-end, il le réveille aux premières lueurs du jour et l’emmène casser des murs, scier des poutres. Apprentissage de l’endurance dans les aubes rugueuses. Seule source d’affection : le grand-père maternel, rescapé du génocide arménien. “Après ‘papa’ et ‘maman’, il a appris à dire ‘génocide’, resitue son ami Me Sevag Torossian. Pour lui, ‘arménien’ et ‘avocat’ sont synonymes.” »

La vie s’écoule dans un monde d’hommes qui jouent au poker, de proxénètes en manteaux de fourrure qui roulent en Ford Mustang, et d’autres aux trognes évadées des Affranchis de Martin Scorsese. Puisqu’il veut tout dire, il se souvient de bagarres au couteau, de cambriolages dans les maisons voisines. “En vacances, j’avais 10 ans avec mon frère ainé, il nous arrivait de voler les portefeuilles des Belges, des Hollandais, mais l’argent n’était pas pour nous, on le donnait à ma mère, pour qu’elle achète de la bouffe.”

[…]

En juin [1982], lors de son oral pour entrer à l’école du barreau, il sidère l’audience à son tour, et défend le terrorisme au nom de la cause arménienne [rappelons que l’attentat de la gare Cornavin, qui a tué un passant suisse, a déjà eu lieu, de même que l’assassinat de Neslihan Özmen, enfant de quartorze ans coupable seulement d’être née turque]

[…]

C’est dans cette même bibliothèque de l’Ordre qu’il a prononcé ses premiers discours, et ici même qu’il a reçu la Légion d’honneur en juin 2016. Dans son discours, il évoquait alors la rue de la Défense, les bagarres de rue, ses parents “forcenés à en crever”, son grand-père rescapé. “Je suis viscéralement imprégné de l’Arménie, prêt au pire pour en défendre la cause. Et je serai avocat jusqu’à la fin. Je n’ai pas encore fini d’emmerder le monde.” »


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Jean-Marc Théolleyre, « L’Armée secrète vue par la DST », Le Monde, 26 février 1985 :

« De fil en aiguille, la DST [Direction de la surveillance du territoire, fusionnée depuis avec la Direction des Renseignements généraux pour former la Direction générale de la surveillance intérieure] a repéré tous les amis de Garbid[j]ian. Sa certitude est qu’à la veille de l’attentat d’Orly Garbidian était devenu le patron de l’ASALA [Armée secrète arménienne pour la libération de l’Arménie] en France et peut être en Europe. C’est ainsi qu’il s’était assuré le concours de Soner Nayir, aujourd’hui l’un de ses deux coaccusés. Un Nayir qui, lui aussi, avait rencontré Agopian [chef de l’ASALA] lors du fameux voyage d’Athènes et dont l’appartement de Courbevoie devait finalement constituer le PC de l’équipe. »

 

Jean-Marc Théolleyre, « Un verdict ordinaire contre le terrorisme », Le Monde, 5 mars 1985 :

« En s’achevant, dimanche 3 mars aux petites heures, par la condamnation à la réclusion perpétuelle de Varoujan Garbidian et par celles de Soner Nayir et d’Ohannès Semerci à, respectivement, quinze ans et dix ans de la même peine, le procès des accusés de l’attentat d’Orly a connu un épilogue dont les autorités turques se sont déjà déclarées aussi satisfaites que les défenseurs mécontents, puisque, déjà, des pourvois en cassation sont envisagés [ils ont été effectivement déposés, puis rejetés]. »

 

Florence Avakian, « Over a Million in Armenia Plead for Release of Convicted ASALA Man from. French Prison », The Armenian Reporter (New York), 11 novembre 1995 :

« Au total, 1 227 473 citoyens de l’Arméniens ont signé une petition qui circule pour appeler les autorités françaises à libérer de prison M. Varoujan Garbidjian, un membre de l’Armée secrète arménienne pour la libération de l’Arménie (ASALA) qui purge une peine de réclusion à perpétuité pour avoir organisé l’attentat à l’explosif contre le bureau de la Turkish Airlines à l’aéroport de Paris Orly, en 1983 [la bombe n’a en fait explosé que par erreur à Orly : elle devait exploser en vol ; voir ci-dessous]. »

 

Radio Free Europe / Radio Liberty, « Newsline », 7 mai 2001 :

« LE PREMIER MINISTRE ARMÉNIEN RENCONTRE UN MEMBRE LIBÉRÉ DE L’ASALA

Noyan Tapan et le bureau de RFE/RL à Erevan rapportent que, rencontrant le 4 mai [2001] Varoujan Garbidjian, un ancien membre de l’Armée secrète pour la libération de l’Arménie (ASALA), le Premier ministre Andranik Markarian a exprimé sa “joie” de voir Garbidjian libéré d’une prison française où il a purgé presque dix-huit ans de réclusion pour le rôle que lui a attribué [la justice française] dans l’attentat à l’explosif contre le bureau de la Turkish Airlines à Orly [erreur : la bombe était supposée exploser en vol, ce qui aurait tué 117 personnes, et ne visait donc pas le bureau lui-même]. »

 

Varoujan Garbidjian, entretien à Hayots Ashkar, 2008 :

« Nous avions prévu de faire sauter l'avion de la compagnie Turkish Airlines. »

ð  Garbidjian ne faisait que répéter ce qu’il avait déjà dit aux enquêteurs en 1983 : le but était bien de tuer les 117 passagers et membres d’équipage.

 

« “We are a triumphant nation” : Varuzhan Karapetyan », Ysu.am, 15 mars 2017 :

« Aujourd'hui, le club de préparation militaire de l4YSU [Université d'État d'Erevan], qui a reçu le nom de L. Azgaldyan, a organisé une réunion avec Varuzhan Karapetyan [Varoujan Garbidjian], membre de l'ASALA.

Les organisateurs de l'évènement intitulé “La référence historique aux activités de l'ASALA” ont noté que cette journée est spéciale. Le 15 mars 1921 à Berlin, le vengeur Soghomon Tehleryan [dirigé par Chahan Nathalie, source d’inspiration, plus tard, pour l’ASALA] abattit l’un des organisateurs du génocide arménien, Talat Pacha.

Varuzhan Karapetyan a salué les étudiants et a déclaré que ces réunions sont très importantes pour les jeunes. Il a ensuite évoqué l'histoire, les activités et les objectifs de l'Armée secrète arménienne pour la libération de l'Arménie.

“1965 a été un tournant pour notre nation, qui avait été massacrée cinquante ans auparavant et renaissait. Les intellectuels et les gens ordinaires dans un esprit revendicatif sont descendus dans les rues, exprimant leurs inquiétudes au sujet de ce crime”, a-t-il dit.

L’invité a noté que les jeunes d’aujourd’hui, la génération de l’indépendance, sont des gens heureux parce qu’ils peuvent revendiquer ouvertement quelque chose, exprimer leurs idées et soumettre à la communauté internationale toute plainte qu’ils jugeraient utile.

“Je regarde vos visages brillants et je me rends compte que notre lutte n'a pas été vaine. Nous, la génération plus âgée, nous rendons compte que nous sommes une nation victorieuse”, a déclaré Varuzhan Karapetyan.

Les étudiants ont entonné des chants et interprété des danses patriotiques, ainsi que des danses militaires, et notre invité a répondu à leurs questions. »

 

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vendredi 27 novembre 2020

Misak Torlakian : du terrorisme de Némésis au renseignement du Troisième Reich

 



Némésis était le nom donné par la Fédération révolutionnaire arménienne à un groupe terroriste contrôlé par les instances dirigeantes du parti, créé à la fin de 1919 et actif jusqu’en 1922 au moins, pour assassiner des anciens ministres ottomans, des anciens ministres azerbaïdjanais et des Arméniens loyalistes.

 

Eyal Ginio, « Debating the Nation in Court: The Torlakian Trial (Istanbul, 1921) », Armenian Review, LV/1-2, automne-hiver 2015, pp. 1-16 :

« Le 18 juillet 1921, vers minuit, un petit et joyeux groupe de trois hommes et une femme sont sortis du bâtiment de la municipalité à Topbaşı retour à son hôtel dans le quartier de Beyoğlu à Istanbul. Après avoir passé la soirée dans l'un des théâtres du quartier, le groupe était engagé dans une conversation animée. En raison de l'obscurité ambiante et la musique bruyante émanant du café voisin, des maisons et des clubs, personne dans le groupe n'avait pu remarquer qu'ils étaient suivis de près par un inconnu. Arrivés à l'hôtel Péra — leur résidence temporaire depuis leur arrivée de Bakou — le suiveur a ouvert le feu sur l'un d'eux avec son pistolet. L'homme visé, Behbud Han Cevançir, a été grièvement blessé. Il avait auparavant été ministre des Affaires intérieures de l’éphémère République indépendante d'Azerbaïdjan (1918-1920). Cependant, son séjour à Istanbul était dû à une nouvelle nomination qu’il avait pu obtenir après la dissolution de la jeune république. Il était maintenant l'attaché commercial représentant la République soviétique d’Azerbaïdjan — une entité politique intérimaire qui affirmait conduire sa propre politique étrangère, avant d'être incorporée, à la fin de 1922, dans la Fédération soviétique de Transcaucasie, une partie de l'Union soviétique.

Les deux autres hommes présents sur les lieux étaient ses deux frères ; la femme était son épouse. Alors que Cevançir était toujours blessé sur le au sol, ses frères ont pu poursuivre le tireur anonyme et l'appréhender avant l'arrivée de la police. L’identité du tireur a été immédiatement révélée : son nom était Misak Torlakian, un Arménien au début de la trentaine détenant la citoyenneté ottomane. Originaire de la région de Trabzon, il a passé une partie de la Première Guerre mondiale dans les territoires russes, notamment Bakou. En janvier 1921, Torlakian arriva à Istanbul où, plus tard, il rencontra sa victime. Alors que Torlakian était interrogé, Cevançir est décédé des suites de ses blessures dans un hôpital militaire britannique voisin. »

ð  Torlakian fut acquitté pour troubles mentaux (alors qu’il n’était pas cliniquement fou) par un tribunal militaire britannique (İstanbul était alors une ville occupée). Ce que Mme Ginio ne dit pas, probablement parce qu’elle ne le sait pas, c’est que les juges militaires ont reçu des menaces de mort.

 

Mehmet Perinçek, « Nazi-Dashnak collaboration during World War II », dans AVIM (dir.), Turkish-Russian Academics. A Historical Study on the Caucasus, Ankara, Terazi, 2016, pp. 199-231 :

« Après la bataille de Stalingrad, les responsables de l’Abwehr [service de renseignement de l’armée allemande] se mirent à former un groupe arménien particulier. Le groupe de Dro [Drastamat Kanayan, ancien ministre de la Guerre pendant la République indépendante d’Arménie, 1918-1920] (qui avait été promu au rang de général) faisait aussi partie de cette formation. Créé au début d’avril 1943, le groupe reçut le nom d’Abwehrgruppe (AG)-114 “Dromedar”. Initialement, il était prévu de parachuter ces hommes en Arménie [soviétique], depuis des avions, derrière la ligne de front [rappelons ici que si la bataille de Stalingrad fut une lourde défaite pour l’Axe, c’est celle de Koursk, en juillet 1943, qui brisa définitivement tout élan offensif des nazis et de leurs alliés sur le front de l’est]. Toutefois, les conditions sur le front en question étant défavorables, le commandement allemand et le quartier général de Dro durent changer quelque peu leurs plans.

À la fin d’avril 1943, le groupe reçut un statut indépendant. Le premier subordonné de Dro, était Kuro (Nikolai Tarhanian) et le chef d’état-major Tigran Bagdassarian. Misak Torlakian reçut la responsabilité des activités de renseignement et de sabotage. L’équipe d’espionnage de l’AG-114 était formée d’anciens membres de l’armée de l’Arménie dachnake (1918-1920). » (pp. 207-208)

« Lui [Torlakian] et Dro arrivèrent en Crimée en 1942, où il dirigea le bureau dachnak [donc la branche locale de la Fédération révolutionnaire arménien, « dachnak » étant le surnom donné aux membres de ce parti, et au parti lui-même]. Il présenta aussi à [Alfred] Rosenberg [ministre nazi pour les territoires soviétiques occupés] des documents sur les plans de la Turquie dans le Caucase. Il partit dans les Balkans avec les armées allemandes en 1944. Après la guerre, il mena des activités antisoviétiques avec Dro, aux États-Unis et en Allemagne occupée. » (p. 214)


« ARF Armenia Chairman Visits Montebello Armenian Community », Asbarez, 11 février 2020 :

« Le 6 février, Ishkhan Saghatelyan, président du Conseil suprême de la Fédération révolutionnaire arménienne d’Arménie, a rendu visite à la communauté arméno-américaine de Montebello, dans le cadre de son voyage de travail dans l’ouest des États-Unis.

Il était accompagné de Garo R. Madenlian, Levon Kirakosian, Aida Dimejian et Stepan Boyadjian, membres du Comité central de la FRA pour l’ouest des États-Unis, ainsi que du président de la section « Dro » de Montebello Viken Pakradouni, de Koko Artinian et Gev Iskajyan, autres cadres locaux, d’Ashod Mooradian, membre de l’ANCA [Armenian National Committee of America] de Montebello.

[…]

Après l’école Mesrobian, le groupe s’est dirigé vers le cimetière Evergreen où ils ont rendu hommage au héros national arménien Misak Torlakian dans la section arménienne du cimetière. Saghatelyan et son entourage ont déposé des couronnes sur la tombe ; des membres du clergé de la cathédrale arménienne de Sainte-Croix ont prié. »

 

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jeudi 26 novembre 2020

Monte Melkonian : assassin d’enfant, criminel de guerre, héros national arménien

 


Une des statues de l’assassin d’enfant Monte Melkonian érigées en Arménie


Le ministère arménien de la Défense a qualifié, le 25 novembre 2020, sur Twitter, le terroriste Monte Melkonian de « héros national arménien », confirmant une position officielle qui est celle de tous les gouvernements arméniens depuis 1991. Numéro 2 de l’Armée secrète arménienne pour la libération de l’Arménie (ASALA, raciste et antisémite) de 1980 à 1983, Melkonian fait scission en juillet 1983 pour créer l’ASALA-Mouvement révolutionnaire. Arrêté à Paris en 1985, il est condamné l’année suivante à six ans de prison, dont quatre ans ferme, pour association de malfaiteurs, en relation avec une entreprise terroriste, détention illégale d’arme à feu, d’explosifs et de faux passeport. La Grèce ne le réclame pas, peut-être par manque d’informations. Cependant, il est aujourd’hui avéré que Melkonian a personnellement tué, par pur racisme, un diplomate turc et sa fille de quatorze ans à Athènes, en 1980.

 

Christopher Gunn, Secret Armies and Revolutionary Federations. The Rise and Fall of Armenian Political Violence, 1973-1993, thèse de doctorat en histoire, Florida State University, 2014, pp. 221-222 :

« Le 31 juillet [1980], à Athènes, en Grèce, les attentats des terroristes arméniens sont tombés au plus bas, moralement parlant, lorsque l’agent de l’ASALA Monte Melkonian a tenté de tuer l’attaché administratif turc en Grèce, Galip Özmen, 42 ans, et toute sa famille. Dans ce qui est sans doute le plus brutal de tous les attentats menés contre des diplomates turcs, Galip et sa fille Neslihan, âgée de 14 ans, ont été tués, tandis que sa femme et son fils de 17 ans ont été blessés par balles. Melkonian, un Arménien-Américain de Californie et diplômé de l’université de Californie à Berkeley, qui a commis cet assassinat, avait rejoint l’ASALA à la fin du mois de mai 1980, après avoir passé un certain temps dans les milices arméniennes opérant à Beyrouth. Il n’a jamais été arrêté ou inculpé pour cet acte et les autorités grecques ont confié à un diplomate américain que la raison pour laquelle les forces de police européennes n’avaient que si peu de chance d’identifier et d’appréhender les Arméniens impliqués dans ces homicides était que les méthodes “‘claniques et soudées’ typiques des Arméniens ont rendu extrêmement difficile la tâche d’infiltrer les groupes clandestins”. [Ce à quoi on peut ajouter qu’il s’est trouvé plus de braillards prêts à manifester pour le terrorisme que de criminels endurcis prêts à prendre le risque d’être par le MIT turc ou le Mossad israélien.]

D’après le récit publié par son frère, Melkonian s’est positionné devant le bureau de la Turkish Airlines durant la soirée du 31 juillet et quand une voiture avec des plaques diplomatiques est arrivée, il a vidé le chargeur de son son arme sur les quatre personnes à l’intérieur. Melkonian a affirmé qu’il était incapable de voir qui était dans le véhicule, à cause de ses vitres teintées. Le rapport du Département d’État, fondé sur des témoignages oculaires, a déclaré que l’assassin avait attendu devant la maison d’Özmen, regardé la famille monter dans la voiture, puis attaqué. Si l’assassinat d’[Ahmet] Benler [fils de l’ambassadeur turc aux Pays-Bas, tué en 1979 par les Commandos des justiciers du génocide arménien] a montré que les terroristes arméniens étaient désireux d’étendre leurs attaques homicides des représentants de la République turque aux membres adultes de leur famille [Benler avait 27 ans], Melkonian a prouvé que la haine instillée par la campagne de propagande arménienne était suffisante pour justifier le meurtre d’enfants turcs. Même l’acte le plus condamnable qui se pût imaginer était maintenant justifié par la défense de la cause. »

 

Vidéo de 1993 montrant l’assassin d’enfant Monte Melkonian donnant dix heures aux Azerbaïdjanais pour quitter la ville de Kalbajar (où il y avait moins d’1 % d’Arméniens avant l’invasion) :



Quelques semaines plus tard, ce terroriste — qui était un piètre soldat — fut abattu lors d’un accrochage avec des militaires azerbaïdjanais (pourtant peu expérimentés).

 

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mercredi 25 novembre 2020

Territoires azerbaïdjanais occupés puis récupérés : des destructions jusqu’aux derniers jours de l’occupation


 


Agence France-Presse, « L’Azerbaïdjan reprend le district de Kelbadjar, voisin du Haut-Karabakh, la deuxième des trois rétrocessions », Lemonde.fr, 23 novembre 2020 :

« Les unités de l’armée azerbaïdjanaise ont récupéré, dans la nuit de mardi 24 à mercredi 25 novembre, le contrôle du district de Kelbadjar, avoisinant le Haut-Karabakh, a affirmé le ministère de la défense à Bakou dans un communiqué. C’est la deuxième des trois rétrocessions auxquelles l’Arménie doit procéder après le cessez-le-feu ayant mis fin à six semaines de combats meurtriers dans cette région disputée. […]

En signant le cessez-le-feu, Erevan a accepté de rendre trois districts entourant le Haut-Karabakh – Agdam, Kelbadjar et Latchine – qui échappaient au contrôle de Bakou depuis près de trente ans et une première guerre dans les années 1990. Le district de Kelbadjar, comme celui d’Agdam rendu le 20 novembre et celui de Latchine, qui doit l’être le 1er décembre, formaient jusqu’alors une zone tampon entourant le Haut-Karabakh. Quatre autres districts formant ce glacis sécuritaire ont, eux, été repris militairement par Bakou.


Un exode, des maisons brûlées, des arbres abattus

Dans les jours précédant la rétrocession, l’Agence France-Presse (AFP) a vu les habitants arméniens abattre des arbres, récupérer les câbles électriques et même charger sur un camion des parties d’un barrage hydroélectrique. “Ils brûlent [les maisons], les arbres sont abattus et les gens emportent tout”, a déclaré à l’AFP un maçon de 53 ans, Gaguik Iakchibekian, expliquant que les Arméniens refusaient que des Azerbaïdjanais puissent habiter leurs maisons. »


« Haut-Karabakh : les Arméniens brûlent leurs maisons avant la cession à l'Azerbaïdjan », Lefigaro.fr, 15 novembre 2020 :

« Des maisons dans des villages du Haut-Karabakh dont l'Azerbaïdjan doit reprendre le contrôle dimanche 15 novembre étaient en feu samedi, incendiées par leurs habitants avant leur fuite vers l'Arménie, a constaté un journaliste de l'AFP.

“C'est le dernier jour, demain les soldats azerbaïdjanais seront là”, a déclaré un soldat dans le village de Charektar, dans la région de Kalbajar qui doit être cédée à Bakou. »


Précision : au recensement soviétique de 1989, la population arménienne de ce district n’atteignait pas 1 % de la population totale ; « leurs maisons » sont des maisons volées à des Azerbaïdjanais, et la majorité des Arméniens en question ne sont pas natifs de la région.


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lundi 23 novembre 2020

Les dévastations commises par les forces arméniennes (et certains civils) dans les territoires azerbaïdjanais occupés

 


Dévastation du musée du pain à Ağdam (ville occupée entre 1993 et 2020)


Paul Tavignot, « Les rêves de retour des déplacés du Haut-Karabakh », Le Monde, 19 novembre 2020 :

« Aujourd’hui, Mme Allahverdiyeva habite avec quatre membres de sa famille un taudis de deux pièces dans un faubourg de Bakou. “Nous avons construit la maison nous-mêmes, en 2006”, annonce-t-elle fièrement, pendant que sa fille Tanara sert le thé traditionnel. Ulkar Allahverdiyeva ne lâche pas des mains un cadre dans lequel sont juxtaposées sept photographies. “Mon mari, mon fils et mon neveu”, désigne-t-elle du doigt. “Ils ont ensuite pris les armes et combattu. Et ils sont morts. Ce sont des chahids [martyrs].”

À l’époque, elle ne s’imaginait pas ne jamais revoir sa maison. Son village de Horovlu a été entièrement détruit, comme la centaine de villages azerbaïdjanais du Karabakh. Mais jamais elle n’a douté qu’elle reviendrait sur la terre de ses ancêtres. »


Diverses images des dévastations à Ağdam :





Et pour rappel :

Commandant A…, « Les affaires d’Orient », La Petite Gironde, 8 septembre 1922, p. 1 :
« L’Arménien […] ne recourt à la manière forte que lorsqu’à son tour il est le plus nombreux ; le quartier tatare [azéri] d’Erivan a été complètement rasé il y a peu de temps ; Allah seul pourrait nous dire ce que sont devenus ses habitants. 
Attaqué à l’ouest, attaqué à l’est, le Turc, menacé de suppression, réagit, poussé par l’esprit de conservation. »

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vendredi 20 novembre 2020

La Fédération révolutionnaire arménienne (nationale-socialiste) veut une reprise de la guerre avec l’Azerbaïdjan



Assassinat du consul général de Turquie à Los Angeles par la branche terroriste de la Fédération révolutionnaire arménienne (1982)


 « ARF Leaders Tell Consul General Pashinyan Must Resign », Arfd.am, 14 novembre 2020 :

« Les dirigeants de la Fédération révolutionnaire arménienne [parti qui a collaboré avec le Troisième Reich, sur des bases idéologiques et qui considère toujours ses dirigeants de l’époque comme des héros] ont déclaré jeudi au consul général d’Arménie [à Los Angeles], l’ambassadeur Armen Baibourtian, que l’accord signé par le Premier Ministre Nikol Pachinyan, qui a mis fin à la guerre incessante contre l’Artsakh [république autoproclamée du Haut-Karabakh, dont le « président » a poussé M. Pachinyan à signer ce cessez-le-feu, car il jugeait, non sans raisons, que la situation militaire était désespérée] et l’Arménie était un acte défaitiste et humiliant et qu’il avait déjà été catégoriquement rejeté par le peuple [ce qui revient à dire que quelques milliers de manifestants sont « le peuple »].

“Un tel document est la plus grande trahison commise contre notre nation”, ont déclaré les dirigeants de la FRA à Baibourtian.

Rencontrant Baibourtian au consulat, le Dr Viken Yacoubian [condamné en 1985, puis en appel en 1988, par la justice américaine, pour un projet déjoué d’attentat, qui aurait pu faire, d’après la cour d’appel, jusqu’à 3 000 morts — comme les attentats du 11 septembre 2001], membre du bureau de la FRA, et les coprésidents du comité central de la FRA pour l'ouest des États-Unis, Avedik Izmirlian et le Dr Carmen Ohanian, ont clairement exprimé le vif mécontentement de la FRA et de son vaste réseau d’organisations affiliées, quant aux termes de l’accord [signé à Moscou].

Les dirigeants de la FRA ont déclaré que le gouvernement arménien, dirigé par le Premier Ministre Nikol Pachinyan, est seul responsable de la crise qui a surgi depuis la signature du document [ce qui revient à nier, sans le commencement d’un argument, les responsabilités des gouvernements auxquels la FRA a participé, de 1998 à 2018, dans l’état déplorable des forces arméniennes en 2020, et à occulter que l’une des principales fautes de M. Pachinyan aura été de provoquer la Turquie en août 2020, quand il a parlé de réclamer le traité de Sèvres, ce que la FRA réclame aussi]. Ils ont également exprimé leur déception et leur protestation et ajouté qu’ils se joignaient aux milliers de manifestants à Erevan pour exiger la démission de Pachinyan [on rappellera au passage que la FRA n’a plus aucun élu au Parlement arménien depuis les élections législatives de 2018].

Décrivant les difficultés qu’ils anticipent, les dirigeants de l'ARF ont souligné la nécessité de modifier le cours de la situation qui pourrait conduire le pays sur une voie sans issue. Ils ont dit que l’Arménie avait besoin de nouveaux négociateurs capables de faire face à ces nouveaux défis.

Ils ont également appelé à la libération immédiate des dirigeants et des membres de l’opposition qui ont été arrêtés par le service de sécurité nationale d’Arménie mardi et mercredi.

L’ambassadeur Baibourtian s’est engagé à faire part de ces préoccupations aux responsables d’Erevan. »

Il est évident que toute tentative de modifier l’accord signé à Moscou signifierait, pour l’Arménie, une reprise de la guerre, sans soutien russe cette fois, voire en devant se battre aussi contre les 1 960 soldats russes déployés (avec leurs chars et leurs lance-missiles à tubes multiples) sur une partie du Haut-Karabakh : autant dire un suicide.


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jeudi 19 novembre 2020

Les erreurs et les fautes accumulées par les gouvernements arméniens depuis les années 2000

 



Olivier Roy, « L’Arménie a cru au mythe de la Russie chrétienne », Le Monde, 19 novembre 2020 :

« […] À l’inverse, l’Arménie, en déclin démographique, a vu son budget militaire stagner et surtout être largement obéré par la corruption et la prévarication des officiels, renforcées par l’instabilité politique. C’est une armée démunie et démoralisée qui a vu débouler les forces azerbaïdjanaises et leurs alliés [l’Azerbaïdjan a certs des alliés, mais rien ne prouve que l’armée turque ou l’armée israélienne, a fortiori l’armée pakistanaise ait participé à la contre-offensive de reconquête] en septembre.


Pas d’effet de surprise

Mais cela n’explique pas tout. Cela fait quinze ans que l’on sait que l’Azerbaïdjan réarme pour reprendre ce qu’il considère comme son territoire. Le président Ilham Aliev, soucieux de se démarquer de son père, Heydar Aliev, le président de la défaite, en a fait une affaire personnelle et s’en est donné les moyens. Il n’y a eu aucun effet de surprise dans l’offensive azerbaïdjanaise : la tension montait depuis deux ans sur la ligne de cessez-le-feu et les Russes, bien implantés dans les deux pays, n’en ignoraient rien. Ce qui est donc étonnant, c’est l’absence d’anticipation du côté arménien.

Sans nier l’impact de l’incompétence, de la corruption et de l’instabilité politique, sans nier la dissymétrie des forces, il y a certainement un autre facteur qui a joué : l’Arménie comptait sur le soutien indéfectible de la Russie contre la menace “turque” et musulmane. Bref, elle a pris au mot cette image d’une Russie chrétienne, dernier rempart de l’Occident dans la grande ligne de faille qui le sépare de l’islam, où l’Arménie serait à l’avant-poste. Dans ce rôle, la Russie aurait pu dissuader Bakou de passer à l’offensive.


Abandon de l’Arménie

Pourtant la Russie a consciemment et délibérément laissé l’Arménie se faire écraser [en fournissant quand même des armes pendant l’été 2020 puis à nouveau pendant la guerre de cet automne, il faudrait le préciser]. Tout laisse penser que non seulement les Russes étaient au courant du déclenchement de l’offensive, mais qu’ils en avaient probablement discuté les limites avec Bakou et fixé à l’avance les lignes rouges (ne pas franchir les frontières de l’Arménie et se contenter de reprendre des territoires qui, selon le droit international, sont azerbaïdjanais).

Cette image d’une Russie “chrétienne” est agitée depuis vingt ans par des géopoliticiens occidentaux, souvent proches de l’extrême droite et qui aiment à lier la question migratoire avec la géostratégie : l’Occident menacé de l’intérieur comme de l’extérieur par l’islam aurait la Russie comme dernier défenseur. D’où un thème fréquent que l’on a souvent entendu dans des milieux militaires : on s’est trompé d’ennemis, il fallait être du côté des Serbes en Bosnie et du côté d’Assad en Syrie.

C’est ne rien comprendre à la vision russe, qui est fondée d’abord sur une realpolitik des rapports de force, et sur une conception proprement russe et fort peu “occidentale” (et encore moins chrétienne) de la géostratégie. »


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mardi 17 novembre 2020

La pusillanimité du « Figaro » dans le contexte des menaces de mort proférées par des nationalistes arméniens


 


Rahman Mustafayev, « Sur le conflit au Karabakh seule la voix de l’Arménie a été entendue — Lettre ouverte au "Figaro" », Causeur, 17 novembre 2020 :

« Mesdames, Messieurs les journalistes du Figaro,

J’ai toujours considéré que parmi les journaux français, le Figaro était celui qui se souciait le plus du pluralisme des expressions en privilégiant la représentation de la diversité des opinions. Pourtant, s’agissant du conflit qui se déroule actuellement dans la région azerbaïdjanaise du Haut-Karabakh, force est de constater que ce ne fut pas le cas. Depuis le début de la guerre il y a six semaines, le Figaro donne le champ libre à l’expression d’une seule et unique opinion, celle des Arméniens.

Cette tribune, dont la première version a été envoyée au Figaro fin octobre, n’a pas été publiée, sans qu’aucune explication ne soit donnée. Un tel parti pris crée un malaise. Ne pas laisser s’exprimer l’autre voix du conflit c’est faire le choix d’une vision borgne de celui-ci. Ce choix ne sert pas les intérêts de l’opinion publique. Elle est aussi indigne d’un journal comme le vôtre. »

Lire la suite : https://www.causeur.fr/karabagh-rahman-mustafayev-armenie-azerbaidjan-187177


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L’arménophilie fasciste, aryaniste et antisémite de Carlo Barduzzi



Stefano Riccioni, « Armenian Art and Culture from the Pages of the Historia Imperii Mediterranei », Venezia Arti, n° 27, décembre 2018 :

« Armeni Ariani (Arméniens aryens) est une étude sur les caractéristiques raciales des Arméniens, traduite de l’édition originale allemande publiée en 1934 par la Société germano-arménienne de Berlin, dédiée à la mémoire de l’orientaliste Josef Markwart (1864-1930), historien et philologue. Comme la “Note” à la traduction italienne l’indique : “Ce travail […] offre un ensemble de preuves concluantes quant à l’aryanité du peuple arménien, à la suite du décret pris le 3 juillet 1933 par le gouvernement national-socialiste”. Le décret stipulait que […] les Arméniens devaient être considéré comme intégralement aryens.

La préface de Carlo Barduzzi exprime elle aussi la même pensée : “Cette documentation sape cette affirmation commune et fausse, qui consistait à soutenir qu’un lien racial existe entre le peuple arménien et le peuple juif, ce qui est absurde […]. Ainsi, la nation arménienne a une origine purement aryenne”. Barduzzi, consul général de Sa Majesté et professeur au Centre national pour la préparation politique de la jeunesse (Console generale di Sua Maestà et Docente al Centro Nazionale di Preparazione Politica per i giovani), a également écrit la Romanità dell’Armenia (Barduzzi 1940), qui décrivait brièvement l’histoire tourmentée de l’Arménie, qu’il appelait la “sentinelle de l’Empire romain”, et la mettait ainsi en fort contraste avec Israël, dont les descendants étaient également loin de leur patrie. »

À noter que Carlo Barduzzi fut aussi un contributeur de La Difesa della Razza (« La Défense de la race »), « revue bimensuelle et organe militant du racisme à l’italienne. Sur les premières couvertures figurait un photomontage illustrant efficacement les nouvelles thèses racistes. Trois types raciaux étaient mis en perspective: le Doryphore de Polyclète incarnait la race aryenne. Il était à la fois séparé et protégé des deux autres types raciaux – une statue de juif et une photographie d’Africain – par un glaive, emblème de la loi fasciste. “Vitrine” de la propagande raciale, La Difesa della Razza s’imposa comme le lieu même de fusion du racisme colonial et de l’antisémitisme. La presse fut invitée à y puiser thèmes et matériaux. » (Marie-Anne Matard-Bonucci, « D’une persécution l’autre : racisme colonial et antisémitisme dans l’Italie fasciste », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2008/3, pp. 124-125).

 

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dimanche 15 novembre 2020

Le négationnisme (le vrai) sur l’ex-forum d’armenews.com

 Jean-Marc « Ara » Toranian a annoncé, le 14 novembre 2020, que le forum de son site était fermé, du moins jusqu’à ce qu’une solution permettant d’identifier avec certitude chaque participant. Cela nous ramène à 2008, puisqu’en janvier cette année-là, le même M. Toranian avait supprimé la possibilité de réagir en bas des articles, à la suite d’une plainte pour incitation à la violence raciale, déposée par le Comité de coordination des associations franco-turques de la région lyonnaise, puis fermé la version précédente du forum de discussion, à la suite d’une plainte pour diffamation déposée par moi. Arguer d’un anonymat problématique des intervenants les plus agressifs, en 2020 est donc pour le moins étrange, douze ans après cette double expérience pénible. C’est d’autant plus étrange que certains des pires messages sont dus à un internaute parfaitement identifié : Samuel Tilbian. Et quoi qu’en soit, il ne faut pas s’étonner que des lecteurs d’un site qui recommande la lecture d’Aram Turabian — un agitateur nationaliste arménien de l’entre-deux-guerres, qui se revendiquait fasciste, raciste et antisémite — publient des messages fascisants, racistes et antisémites.

Je profite de cette suppression pour montrer ici la reproduction d’un message qui n’a jamais été censuré en tant que tel (il a disparu avec le reste du forum) et qui, ce qui est encore plus grave, n’a pas suscité la moindre réaction hostile de la part des autres participants :


Ce texte touche au négationnisme, au vrai sens du mot puisqu’il nie (du moins en très grande partie) la politique nazie visant à exterminer les Juifs en Europe. Il s’agit d’un négationnisme particulièrement grossier, puisqu’il consiste à faire dire aux premiers historiens de la Shoah ce qu’ils n’ont jamais dit. Dans le Bréviaire de la haine, publié pour la première fois en 1951 chez Calmann-Lévy, Léon Poliakov donnait le chiffre d’environ six millions de victimes. Dans The Final Solution, dont la première édition date de 1953, Gerald Reitlinger donnait une estimation volontairement minimaliste de 4 200 000. Dans la première édition (1961) de The Destruction of the European Jews comme dans les suivantes (traduction française des deuxième et troisième éditions : La Destruction des Juifs d’Europe, Paris, Gallimard, 1988 et 2006), Raul Hilberg arrivait à 5 100 000 morts. Dans The War against the Jews paru en 1975 (version française : La Guerre contre les Juifs, Paris, Hachette, 1977), Lucy S. Dawidowicz en tenait pour environ 5 934 000. 

À part Reitlinger, qui ne prétendait donner qu’un minimum minimorum, tous les travaux historiques, de 1951 à nos jours, ont donné, pour le nombre de Juifs assassinés par les nazis et leurs auxiliaires, une estimation comprise entre cinq et six millions. Quant au tribunal militaire international de Nuremberg, il avait retenu le chiffre de 5 700 000. Par contre, ce chiffre d’un million et demi figure dans un article de l’hebdomadaire d’extrême droite Rivarol paru le 31 mai 1951 (cité dans Joseph Algazy, La Tentation néofasciste en France de 1944 à 1965, Paris, Fayard, 1984, p. 131). Il faut vraisemblablement y voir l’origine lointaine de cette affabulation écrite en 2020.

Il est tout à fait remarquable qu’un négationnisme aussi grossier ne provoque strictement aucune réaction négative dans un milieu qui s’emploie à détourner ce mot pour discréditer des thèses historiennes auxquelles il n’a rigoureusement rien à répondre sur le fond. C’est remarquable, mais nullement étonnant, puisque l’Arménie est l’alliée, depuis son indépendance, de l’Iran des mollahs, qui a fait du négationnisme (le vrai) une politique d’État depuis la fin des années 1990 (affaire Roger Garaudy, concours de caricatures sur la Shoah, remise d’un prix à Robert Faurisson, iinancement d’Alain Soral, etc.).

Cette véhémence antisémite et nazifiante ne se limite pas à l’Arménie elle-même et à la France. Pas plus tard que le 13 novembre 2020, la nommée Anna Kachikyan, rédactrice en chef de l’Armenia Report (site qui se présente comme la principale source d’information en anglais sur l’Arménie) et qui a vingt-huit mille abonnés sur Twitter (parmi lesquels le principal dirigeant du parti Ramkavar aux États-Unis, Mihran Toumajan) a repris un slogan néonazi en écrivant : « Hitler avait raison depuis le début. »


Comme chacun peut le constater, elle a obtenu 185 retweets, sans compter ceux qui incluaient un commentaire (parfois positif, parfois négatif), et pas moins de 1 073 J’aime.

L’antisémitisme arménien étant l’un des moins réprimés, son tweet a certes été supprimé, mais son compte est toujours actif : elle n’a même pas eu à subir 24 h de suspension.


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